Lambert Wilson et son père Georges Wilson dans Bérénice en 2008© Angeli
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Le poids du père, cela résonne comme le titre d'une pièce bouleversante, d'un roman poignant ou d'un long métrage émouvant. C'est, pour Lambert Wilson, le vécu. Le comédien a perdu son père, Georges Wilson, décédé en février dernier. S'il a évoqué le burn out qu'il a subi alors qu'il faisait son deuil, l'acteur revient sur la place de ce patriarche dans sa vie pour le magazine Télérama. D'une grande sincérité, il évoque son rôle et son rapport difficile avec cet homme, figure du théâtre.
Nourri, voire gavé de Brecht et de Shakespeare durant l'enfance, Lambert Wilson ne s'intéressait pas vraiment au métier de son père. Jusqu'au jour où, à 13 ans, il accompagne son père à une première des Trois Mousquetaires de Richard Lester : "Il y avait là toutes les stars de l'époque, Raquel Welch, Faye Dunaway. En une soirée, j'ai reçu un shoot de star-system qui m'est instantanément monté à la tête. Le lendemain, je voulais faire du cinéma. Avoir ma gueule en grand sur un écran, jouer dans des superproductions et devenir Robert Redford. Ma mère m'a supplié de renoncer. Quant à mon père, il m'a expliqué que je n'avais pas assez souffert pour être comédien. Jusqu'à son dernier souffle, il a été le plus assassin de mes critiques."
Pour se démarquer de son père, ne pas être un "fils de", Lambert Wilson a voulu partir loin : "Il ne parlait pas anglais, je voulais être bilingue. Il travaillait en France, je rêvais de Hollywood." Les choses ont toutefois été difficiles une fois à l'étranger, l'expérience au Drama Centre était éprouvante : "Quand je suis rentré, le giron familial m'a de nouveau happé. Mon premier rôle au théâtre, je l'ai tenu dans une pièce de Lucian Pintilie, où mon père jouait... mon père. En somme, je suis retourné cherche le bâton pour me faire battre."
L'acteur n'avait pas envie de se rebeller contre cette situation : "Je suis un enfant sage. Je l'ai toujours été. Mettre en péril l'équilibre de ma famille, ce n'était pas dans ma nature. D'autant plus que les relations de mes parents entre eux étaient déjà très tendues. Pour protéger ma mère, j'ai voulu plaire à mon père. Et j'ai courbé l'échine. Alors que mon frère quittait la France pour faire sa vie, loin de cette atmosphère familiale, je faisais allégeance. Ou plutôt, j'engageais un combat larvé avec mon père et sur son propre terrain. [...] A ses yeux, je n'étais bon que lorsqu'il me dirigeait, lui."
Pour expliquer ce comportement, le comédien évoque des douleurs : "Il a souffert de certaines blessures que la seule présence de ses fils suffisait à raviver. Quand j'ai commencé à décrocher des rôles de jeunes premiers, il l'a très mal vécu. Me voir dans un emploi qu'il n'avait jamais eu, ça le torturait. Il était jaloux de la beauté de mon frère et de ses succès féminins. Il était incapable de se réjouir pour nous. Vers l'âge de 40 ans, j'ai essayé de me protéger. Je ne l'invitais plus systématiquement à mes spectacles, je ne cherchais plus à obtenir son approbation."
Aujourd'hui et notamment depuis sa performance dans Des hommes et des dieux de Xavier Beauvois, présenté au festival de Cannes où il a remporté le grand prix du jury, Lambert Wilson est touché par la grâce. "Je n'en reviens pas. On m'aborde dans la rue comme jamais auparavant. [...] Je les sens bouleversés, émus, profondément." Frère Christian dans ce long métrage, il a pu apprécier le superbe succès de cette oeuvre au box office et qui pourrait aller jusqu'aux Oscars. Elle lui a également permis de s'affranchir de la séduction : "Pour une fois je me disais : peu importe la manière dont on te photographie, il ne s'agit pas d'être beau, mais juste."
Lambert Wilson est à l'affiche de La Princesse de Montpensier depuis ce 3 novembre.
Retrouver l'intégralité de cet entretien dans Télérama du 3 novembre.
Nourri, voire gavé de Brecht et de Shakespeare durant l'enfance, Lambert Wilson ne s'intéressait pas vraiment au métier de son père. Jusqu'au jour où, à 13 ans, il accompagne son père à une première des Trois Mousquetaires de Richard Lester : "Il y avait là toutes les stars de l'époque, Raquel Welch, Faye Dunaway. En une soirée, j'ai reçu un shoot de star-system qui m'est instantanément monté à la tête. Le lendemain, je voulais faire du cinéma. Avoir ma gueule en grand sur un écran, jouer dans des superproductions et devenir Robert Redford. Ma mère m'a supplié de renoncer. Quant à mon père, il m'a expliqué que je n'avais pas assez souffert pour être comédien. Jusqu'à son dernier souffle, il a été le plus assassin de mes critiques."
Pour se démarquer de son père, ne pas être un "fils de", Lambert Wilson a voulu partir loin : "Il ne parlait pas anglais, je voulais être bilingue. Il travaillait en France, je rêvais de Hollywood." Les choses ont toutefois été difficiles une fois à l'étranger, l'expérience au Drama Centre était éprouvante : "Quand je suis rentré, le giron familial m'a de nouveau happé. Mon premier rôle au théâtre, je l'ai tenu dans une pièce de Lucian Pintilie, où mon père jouait... mon père. En somme, je suis retourné cherche le bâton pour me faire battre."
L'acteur n'avait pas envie de se rebeller contre cette situation : "Je suis un enfant sage. Je l'ai toujours été. Mettre en péril l'équilibre de ma famille, ce n'était pas dans ma nature. D'autant plus que les relations de mes parents entre eux étaient déjà très tendues. Pour protéger ma mère, j'ai voulu plaire à mon père. Et j'ai courbé l'échine. Alors que mon frère quittait la France pour faire sa vie, loin de cette atmosphère familiale, je faisais allégeance. Ou plutôt, j'engageais un combat larvé avec mon père et sur son propre terrain. [...] A ses yeux, je n'étais bon que lorsqu'il me dirigeait, lui."
Pour expliquer ce comportement, le comédien évoque des douleurs : "Il a souffert de certaines blessures que la seule présence de ses fils suffisait à raviver. Quand j'ai commencé à décrocher des rôles de jeunes premiers, il l'a très mal vécu. Me voir dans un emploi qu'il n'avait jamais eu, ça le torturait. Il était jaloux de la beauté de mon frère et de ses succès féminins. Il était incapable de se réjouir pour nous. Vers l'âge de 40 ans, j'ai essayé de me protéger. Je ne l'invitais plus systématiquement à mes spectacles, je ne cherchais plus à obtenir son approbation."
Aujourd'hui et notamment depuis sa performance dans Des hommes et des dieux de Xavier Beauvois, présenté au festival de Cannes où il a remporté le grand prix du jury, Lambert Wilson est touché par la grâce. "Je n'en reviens pas. On m'aborde dans la rue comme jamais auparavant. [...] Je les sens bouleversés, émus, profondément." Frère Christian dans ce long métrage, il a pu apprécier le superbe succès de cette oeuvre au box office et qui pourrait aller jusqu'aux Oscars. Elle lui a également permis de s'affranchir de la séduction : "Pour une fois je me disais : peu importe la manière dont on te photographie, il ne s'agit pas d'être beau, mais juste."
Lambert Wilson est à l'affiche de La Princesse de Montpensier depuis ce 3 novembre.
Retrouver l'intégralité de cet entretien dans Télérama du 3 novembre.