Qui aurait cru que les quatre murs de la Ferme Montsouris, située 26 rue de la Tombe-Issoire dans le 14e arrondissement de Paris, déchaînerait autant les passions, à commencer par celle de Lorànt Deutsch ? Et pourtant, passionné d'histoire, le comédien de 37 ans s'est engagé dans la lutte, longue de plus de vingt ans, pour la survie de cette vieille bâtisse menacée par les projets d'un promoteur industriel.
Depuis le décès de son propriétaire en 1986, le site, classé Monument historique en 1994 pour ses carrières médiévales souterraines et uniques, est le sujet de toutes les convoitises et se trouve au coeur d'une bataille judiciaire sans merci. Acquise en 2003 par la Soferim, la Ferme Montsouris fait l'objet d'un plan immobilier visant à construire quelque 80 appartements de standing, dont 25% de logements sociaux. Un plan contrecarré à maintes reprises par les suspensions répétées des travaux, obtenues en justice par les opposants - jusqu'au feu vert donné en décembre dernier par le ministère de la Culture.
Cette entreprise est bien évidemment vue d'un très mauvais oeil par nombre de riverains et sympathisants, réunis en collectif depuis 2002 (le collectif Port Mahon), mais également par Lorànt Deutsch qui s'offusque dans les colonnes du journal Le Parisien que "l'on touche" à une maison datant du XIXe siècle. "Comment peut-on la livrer aux pelleteuses des promoteurs, les laisser construire sur un sous-sol de carrières médiévales en y injectant du béton ? La Ferme Montsouris, c'est un symbole nourricier, la dernière trace de ruralité à Paris. Pendant la Dernière Guerre on y trouvait encore du lait. C'est la ferme des Thénardier, comme dans Victor Hugo, écrit l'auteur du best-seller sujet à polémique Métronome, l'histoire de France au rythme du métro parisien.
Dans son injonction, l'acteur et papa de Sissi (2 ans) et Colette (née en mai dernier) ne manque pas de mettre en cause au passage "l'inertie" d'Aurélie Filippetti, ministre de la Culture : "Je ne comprends pas que notre nouveau ministre laisse libre cours aux appétits financiers d'un promoteur. Je ne peux pas accepter que la Soferim se fasse des millions d'euros sur le dos de nos souvenirs parisiens et de notre patrimoine avec l'assentiment du ministère de la Culture." Joint par la publication, ce dernier s'est expliqué, non sans un certain embarras que la principale intéressée "ne se penche pas sur tous les dossiers" mais a assuré avoir l'intention de le "ré-examiner" bientôt.