Lucie Lucas n'était pas dans la rue, samedi 23 novembre 2019, lors des rassemblements organisés pour dénoncer les violences faites aux femmes dans plusieurs villes de France, dont celui qui a vu à Paris des actrices telles qu'Alexandra Lamy, Julie Gayet, Muriel Robin et Laetitia Casta défiler au premier rang d'un cortège de 100 000 personnes. Mais cela n'indiquait en rien que l'actrice star de la série Clem (TF1) ne se sentait pas concernée. Loin s'en faut : le même jour, elle utilisait précisément le hashtag #MeToo pour révéler avoir été victime de deux viols.
Une partie de mon intimité
"Ce que je partage avec vous dans ce post est une partie de mon intimité, un extrait de ce que je suis, a-t-elle explicité en marge de la photo d'un texte, publié sur son compte Instagram, relatant les abus dont elle dit avoir été la victime. Merci à toutes les femmes qui ne se taisent plus. Je me rends compte aujourd'hui combien c'est terrifiant de parler même sans donner de noms, de dates ou de lieux. Je n'ai pas le courage de certaines mais je voudrais leur faire part de toute mon admiration et reconnaissance face à leur force immense et bienfaitrice."
Egrénant point par point, dans une chronologie de plus en plus intolérable à mesure que le récit avance, les griefs et les traumatismes, Lucie Lucas, 33 ans, mariée et mère de trois enfants (Lilou, 9 ans, Moïra, 7 ans, et Milo (1 an), commence par repenser à ces garçons avec lesquels elle jouait au foot et à comment ils la "[coinçaient] dans les toilettes, essay[aient] de la déshabiller et l'oblige[aient] à garder leur langue dans [s]a bouche" alors qu'elle avait entre 6 et 8 ans.
Puis elle se souvient de ce professeur de théâtre au comportement abusif : "Je n'aimais pas qu'il tâte mes seins naissants et remonte ses mains le long de mes cuisses (...) Ça faisait mal et c'était vraiment gênant", écrit-elle dans un parler de fillette.
Je n'ai pas aimé qu'il s'aperçoive que j'étais amoureuse et me viole dans sa cave
Viennent l'entrée en 6e et son lot d'affres au collège du même acabit : les sorties à la piscine, dont elle garde en particulier le souvenir du professeur au "regard insistant", comparant le développement de son corps et celui de sa meilleure amie ; le prof de bio, qui évoque la menstruation féminine en faisant un sondage à main levée dans la classe ; le prof de techno et son attitude perverse...
Avec l'adolescence, Lucie Lucas doit alors endurer la drague lourde, mais ce n'est rien comparé à ce qui l'attend : amoureuse d'un garçon plus âgé pendant les vacances d'été, il profite gravement de la situation. "J'aimais secrètement ce garçon (...) et je n'ai pas aimé qu'il s'en aperçoive et me viole dans sa cave quand je pleurais toutes les larmes de mon corps en disant non mais que je ne criais pas ni ne me débattais pour épargner ma mère qui attendait à quelques mètres de là que je finisse mes "adieux romantiques"", dénonce-t-elle sans fard.
Il m'a violée avec la volonté de faire mal pour me punir
L'actrice passe ensuite en revue son calvaire de "morceau de viande" dans le mannequinat, entre photographes indécents et surenchère de poses vulgaires et de nudité, et en vient à décrire un deuxième viol, commis par un petit copain "qu'elle aimait tant" : "Je n'ai pas aimé qu'il me viole avec la volonté de faire mal pour me punir parce qu'il pensait que je l'avais trompé", lâche-t-elle.
Dans son métier de comédienne aussi, la jeune femme dit avoir été victime d'abus, entre un metteur en scène qui l'a obligée à se dénuder devant toute l'équipe et lui a menti en assurant que son corps nu n'apparaitrait que de loin d'une part, et, d'autre part, un client du monde de la pub qui l'a renvoyée après qu'elle a refusé ses avances.
"Des exemples, j'en ai encore", assure hélas Lucie Lucas dans la deuxième page de sa publication Instagram, ajoutant aussitôt avoir "des souvenirs sexuellement désagréables depuis l'âge de 3 ans". "Et que dire des femmes qui meurent sous les coups ?", s'insurge-t-elle encore, réclamant la paix, l'égalité des sexes, le respect et la fin des violences, appelant de ses voeux un réveil de la société.
"Je ne souhaite pas de tribunal populaire, en ce qui me concerne je ne souhaite pas de tribunal du tout", a écrit Lucie Lucas dans le texte accompagnant les images qu'elle a diffusées. Aux yeux de ceux qui auront lu son message,