Ce 23 juin dernier restera longtemps gravé dans la mémoire d'Aïda. Après des années de bataille de judiciaire, cette jeune Seynoise de 23 ans a en effet vu le tribunal de grande instance de Toulon enfin reconnaître Marcel Desailly en tant que son père. Une véritable victoire pour sa fille - malgré l'appel déposé par le champion du monde 1998 - qui est revenue sur cette affaire et sur ses motivations dans une interview accordée à Nice-Matin.
"Je sais qu'un jour, on sera réuni"
Plus de dix ans après l'avoir vu pour la dernière fois, au Stade vélodrome à Marseille, Aïda a donc enfin officiellement un père : Marcel Desailly. Et c'est bien tout ce que voulait la jeune femme, en formation pour devenir esthéticienne. "Je veux simplement que le nom de mon père apparaisse sur mon acte d'état civil. J'ai un père comme tout le monde et il s'appelle Marcel Desailly", commente-t-elle.
Car malgré ce que beaucoup peuvent penser, Aïda ne s'intéresse pas au gros compte en banque de son père. "C'est totalement faux. Lorsque j'étais enfant, il a été condamné par la justice à verser des subsides pour frais d'éducation comme tout père. Maintenant, je suis majeure. Je n'ai droit à rien. Cette action n'a aucune conséquence financière pour lui", assure-t-elle, "blessée" qu'on puisse penser le contraire.
Pour pouvoir enfin porter le nom de Desailly, Aïda a donc dû se battre pendant de longues années. Il faut dire que l'ex-footballeur ne lui a pas rendu la tâche facile, refusant à quatre reprises de se soumettre à un test de paternité. "J'ai essayé de rentrer en contact avec lui. En vain, regrette-t-elle. C'est difficile car il est un personnage public. On me parle de lui. Deux jours après l'audience au tribunal de Toulon, il s'est fait prendre en photo avec ses enfants à Roland-Garros. Ce n'est pas évident à vivre. Mais j'ai un fort caractère et je sais qu'un jour viendra où l'on sera réuni", tente de positiver la jeune femme.
Cette décision, du "réchauffé" selon Marcel Desailly
Malheureusement pour elle, Marcel Desailly, père de quatre enfants légitimes, semble loin de vouloir voir sa fille. Celui qui a choisi de faire appel de la décision a ainsi froidement parlé de "réchauffé" en réaction au jugement. Un commentaire qui a dû être dur à encaisser pour Aïda et sa mère Hélène. "C'est finalement à l'image de tout le reste, se lamente-t-elle. Il ne devrait pas oublier sa propre histoire", ajoute la jeune femme qui rappelle que l'ancienne star des Bleus est née Odenke Abbey il y a quarante-cinq ans au Ghana, avant d'être adoptée par le mari de sa mère puisque son père biologique ne l'a pas reconnue.
Concernant la médiatisation relative de l'affaire, Aïda se justifie également. "Il pouvait en être autrement. Pour le grand public, il est un héros du foot. Pour moi, il est un père qui se défile. Tout aurait pu se dérouler dans l'ombre s'il avait reconnu mon existence. Je veux simplement un geste de sa part", insiste-t-elle, toujours soutenue par sa maman franco-sénégalaise, Hélène Mendy.
"Je ne reconnais plus celui que j'ai aimé", regrette la maman
Vingt-six ans après sa rencontre avec Marcel Desailly, la maman s'est également confiée à Nice-Matin. Elle insiste sur le fait qu'elle est loin de n'avoir vécu qu'une aventure sans lendemain avec l'ancien footballeur. "Aïda est le fruit d'une véritable histoire d'amour qui a duré plusieurs années et pas une passade d'une nuit avec un garçon qui n'a pas voulu, par la suite, assumer ses responsabilités", raconte-t-elle.
En 1989, au début de leur relation, elle rappelle ainsi que l'ex-footballeur de Chelsea lui avait assuré qu'il avait quitté sa compagne et qu'il avait bien réagi à l'annonce de sa grossesse, même s'ils ne se voyaient qu'épisodiquement. "Quand il est parti à l'AC Milan [en 1993, NDLR], il m'appelait encore. C'est en lisant la presse que j'ai appris qu'il s'était marié avec son épouse actuelle [Virginie, NDLR]", ajoute-t-elle. Elle s'indigne ainsi quand Marcel Desailly parle de "réchauffé". "C'est de sa fille qu'il s'agit. Cela fait plus de vingt ans que je me bats pour mon enfant. Je ne reconnais plus celui que j'ai aimé", assure celle qui n'est plus en contact avec lui depuis 1999.
Marcel Desailly conteste depuis toujours
Reconnu comme le père d'Aïda, Marcel Desailly doit également verser 1 500 euros à la jeune fille au titre des frais de justice. Celle-ci a expliqué qu'en refusant de se soumettre à un test génétique, il avait effectué "un aveu de paternité", ce que le concerné dément encore en faisant appel. "Marcel Desailly conteste être le père et ce n'est pas parce qu'il ne s'est pas soumis à ces tests qu'il est le père. Il n'y a de surcroît aucune preuve de relation intime entre lui et Mme Mendy, pas de photo, pas de correspondance, pas de cadeau...", a estimé son avocat, Me Michel Pautot.
La procédure avait été entamée presque quinze ans plus tôt par Hélène Mendy. En 2000, le TGI de Toulon avait ainsi déjà reconnu la paternité de Marcel Desailly en l'obligeant à verser une rente d'éducation à Aïda. En mai, le parquet de Toulon avait émis un avis favorable à sa demande de reconnaissance de paternité. "Le ministère public a estimé que malgré la volonté de M. Desailly d'échapper à la génétique, des éléments probants sont apportés en faveur d'une reconnaissance de paternité", avait affirmé le représentant du parquet Nicolas Bessonne avant que le TGI ne rende son jugement le 23 juin.