"Injecte-moi une grosse dose." Tels sont les derniers mots de Matthew Perry. Ils sont adressés à son assistant et montrent l'ampleur de son addiction. Aussitôt, ce dernier s'exécute. Il administre au comédien, déjà dans son jacuzzi, une ultime piqûre de kétamine, la troisième de la journée, avant d'aller faire des courses. À son retour, il retrouve l'acteur dans l'eau, inanimé. Les secours, dépêchés sur place ne parviendront pas, même s'il aurait pu être sauvé, à ramener à la vie Matthew Perry. Il aurait fêté ce lundi 19 août ses 55 ans...
Accusé d'avoir réalisé régulièrement ces injections de kétamine "en dehors du cadre habituel d'une pratique professionnelle et sans but médical", l'assistant fait partie des cinq personnes que la police américaine vient d'arrêter au terme d'une très longue procédure...
Les conclusions semblaient évidentes au lendemain du décès de l'ancien comédien de Friends. Le 15 décembre dernier, quelques semaines après sa disparition, le bureau de médecine légale du comté de Los Angeles rendait son verdict : c'est bel et bien en raison d'une trop forte absorption de kétamine, cet anesthésiant parfois détourné à des fins stimulantes ou euphorisantes et de ses "effets aigus" que l'acteur a perdu la vie le 28 octobre dernier dans son jacuzzi. Ce même jacuzzi dans lequel, cinq jours avant, on le voyait se prélasser, de nuit, éclairé par la lune, casque sur les oreilles. Il avait posté la photo sur Instagram. "L'eau chaude qui tourbillonne vous fait du bien ? Je m'appelle Mattman", avait-il écrit en légende. C'était sa dernière photo. Elle a depuis été likée près de 3 millions de fois.
Les réponses fournies par les légistes ont vite été nombreuses. "Avec les niveaux élevés de kétamine découverts dans les échantillons sanguins post mortem, les principaux effets mortels proviendraient à la fois d'une surstimulation cardiovasculaire et d'une insuffisance respiratoire", expliquait le rapport du bureau de médecine légale qui avait en outre précisé que d'autres facteurs avaient contribué à sa mort. Considéré comme "accidentelle" du fait d'une "noyade", les médecins avaient aussi ajouté que les effets conjugués d'une "maladie coronarienne" et de "la buprénorphine", un traitement utilisé contre l'addiction aux opioïdes et dont des traces thérapeutiques avaient été trouvées dans le sang de l'acteur, pouvaient avoir conduit à son décès.
La prise médicamenteuse excessive de kétamine aurait été "suffisante pour lui faire perdre connaissance et perdre sa posture et sa capacité à se maintenir hors de l'eau", avait en outre déclaré le docteur Andrew Stolbach, toxicologue chez Johns Hopkins Medicine, qui avait examiné le rapport d'autopsie à la demande de l'agence Associated Press.
Sachant que la dernière prise officielle de kétamine par Perry dans le cadre d'un suivi thérapeutique avait eu lieu plus d'une semaine avant sa mort et étant admis que ce produit se métabolise dans le corps en quelques heures, les enquêteurs avaient déduit que c'était une prise médicamenteuse postérieure et a priori auto-administrée qui avait conduit à la mort. On sait désormais qui l'a administrée et quand : son assistant, juste avant sa mort.
Néanmoins, des questions subsistaient : qui lui a fourni ce produit ? Un distributeur légal, médecin qui le lui aurait procuré sous le manteau ? Un ami ? Ou un dealer, auprès de qui Matthew Perry, grand consommateur de produits autorisés ou interdits durant toute sa vie, se serait approvisionné ? Avec les arrestations qui viennent d'être effectuées, les réponses viennent de tomber, et elles laissent apparaître une étonnante similitude entre cette affaire et une bien plus ancienne : celle de la mort de Michael Jackson, survenue le 25 juin 2009 !
Peu avant ce gros coup de filet, Tre Lovell, un célèbre avocat qui officie dans le secteur du divertissement interrogé par le Sun, avait prédit que plusieurs personnes allaient être inculpées. Il avait établi un parallèle saisissant avec une célèbre affaire passée... Selon Tre Lovell, "L'accusation la plus probable est celle d'homicide involontaire, et cela pourrait s'appliquer à un médecin qui lui aurait prescrit le médicament, à l'instar du médecin de Michael Jackson, Conrad Murray, qui a été accusé et reconnu coupable de sa mort", déclarait l'avocat qui estimait même que des accusations de meurtre au deuxième degré pourraient être lancées.
En 2009, Michael Jackson est décédé d'un arrêt cardiaque provoqué par une intoxication aiguë au propofol, même si sa fille croit à un complot et à un assassinat. Conrad Murray, le "docteur propofol", comme l'ont surnommé des médias américain est le médecin qui lui avait administré par inadvertance une surdose de ce puissant anesthésique chirurgical qu'il avait utilisé pour traiter l'insomnie de Jackson. Reconnu coupable d'homicide involontaire, il avait été condamné à quatre ans de prison et en avait effectué deux.
Il semble que l'avocat interrogé par le Sun ait vu juste puisque deux praticiens font partie des personnes arrêtées dans le cadre de l'enquête. Jeudi 15 août, le procureur Martin Estrada a confirmé que les médecins avaient fourni à l'acteur une grande quantité de ce produit.
"Ces accusés ont profité des problèmes de dépendance de M. Perry pour s'enrichir", a affirmé le magistrat précisant que les investigations avaient mis à jour "l'existence d'un vaste réseau criminel clandestin, responsable de la distribution de grandes quantités de kétamine à M. Perry, et à d'autres [personnes]". Si l'interprète de Chandler qui avait été amoureux de Jennifer Aniston prenait de la kétamine de façon tout à fait légale et supervisée dans le cadre d'une thérapie pour dépression, il était "retombé dans l'addiction à l'automne 2023", a affirmé le procureur. Une addiction dont ont voulu tirer profit des individus peu scrupuleux.
Parmi eux, deux médecins, et une dealeuse au surnom on ne peut plus évocateur : "la reine de la kétamine". En deux mois seulement ils auraient procuré à l'acteur vingt flacons de kétamine pour une somme de 50 000 euros. Or, selon l'enquête, l'un des médecins Salvador Plasencia, âgé de 42 ans, était tout à fait conscient des risques encourus par Matthew Perry. Il avait même confié à l'un de ses patients que le comédien qui prenait déjà de l'alcool et des drogues pendant Friends, était en train de "déraper". "Je me demande combien ce crétin va payer", avait écrit en septembre 2023 le docteur Plasencia, dans un SMS que les enquêteurs ont retrouvé. En l'occurrence, très cher, puisque ces flacons que les médecins touchaient à 12 dollars, Matthew Perry les a achetés 2000 dollars l'unité ! Sans doute conscient de ses responsabilités, le médecin avait falsifié des dossiers médicaux après la mort du comédien. Il risque jusqu'à 120 ans de prison !
À ses côtés, la "reine de la kétamine", la dealeuse Jasveen Sangha risque la prison perpétuité. Les policiers ont trouvé chez elle 80 flacons de kétamine, de la méthamphétamine, de la cocaïne, du Xanax... autant de produits qu'elle avait obtenus de manière illégale. Pour ne rien arranger à ses affaires, l'enquête a établi que la dealeuse était déjà à l'origine d'un décès : l'un de ses clients est mort en 2019 d'une surdose de... kétamine.
Placée en détention, elle a malgré tout plaidé non coupable et sera jugée le 15 octobre prochain. Le docteur Plasencia a lui aussi plaidé non coupable et a pu rester libre moyennant le versement d'une caution de 100 000 dollars. Son procès se tiendra le 8 octobre. Ira-t-il en prison, comme le médecin de Michael Jackson ? Au regard des soupçons qui pèsent sur lui, il y a tout lieu de le penser...