Son visage et son sourire ravageur vous rappelleront sûrement quelqu'un. Yves Vincent, comédien abonné aux seconds rôles, est mort à l'âge de 94 ans, ont annoncé dans le même temps son éditeur et sa fille Isabelle.
Il avait tourné aux côtés des plus grands, d'Arletty à Ingrid Bergman en passant Louis de Funès et Brigitte Bardot, et il avait été dirigé par les meilleurs, de Roger Vadim à Édouard Molinaro en passant par Jean Cocteau, Robert Lamoureux ou Georges Lautner. Ces dernières années, il avait publié ses mémoires, sobrement intitulés Voulez-vous en sourire avec moi ?, avec, en couverture, une photo des studios Harcourt, ainsi qu'un roman l'an dernier, Des vagues à l'âme.
Né à Thônes, en Haute-Savoie, Yves Vincent a grandi et vécu à Alger jusqu'à l'âge de 21 ans. D'abord sportif (il a été champion du monde de water-polo en 1939) avant de se tourner vers la comédie, il a débuté au théâtre où il s'est révélé en donnant la réplique à la pétillante Arletty dans Un tramway nommé désir (Tennessee Williams), pièce dans laquelle un certain Louis de Funès jouait déjà. Il le retrouvera plus tard dans la saga des Gendarmes, dans laquelle il est et restera le mémorable colonel examinateur. Avant cela, il aura joué aux côtés de grands noms du Septième Art, Daniel Gélin avec Winterset, Michel Audiard pour Méfiez-vous des blondes, Ingrid Bergman et Micheline Presle dans Thé et Sympathie, Brigitte Bardot dans Babette s'en va-t-en guerre ou encore chez Alain Resnais dans Muriel ou le temps d'un retour (1963), où il faisait une apparition avec Nelly Borgeaud, son épouse d'alors.
Sa carrière prend un autre virage à la fin des années 1960, d'abord avec Le Gendarme se marie de Jean Girault et, bien sûr, Hibernatus d'Édouard Molinaro dans lequel il joue le père de la jeune fille dont tombe amoureux le héros dégivré campé par De Funès. Il revient face à la bande du regretté Michel Galabru dans Le Gendarme en balade en 1970. Par la suite, il joue dans Impossible... pas français et se fait recruter par un autre natif d'Algérie, décédé l'an dernier, Roger Hanin, pour La Rumba. Yves Vincent quitte alors le cinéma et signe un dernier coup d'éclat, dans la petite lucarne, pour la série Tribunal : pendant les 390 épisodes de ce huis-clos judiciaire phare de TF1 diffusé à la fin des années 1980, dont Jean-Luc Reichmann assurait la voix off, il imposa le respect avec beaucoup de charisme dans la robe du juge Garonne.
Côté coeur, Yves Vincent a partagé la vie de la speakerine Jacqueline Huet dont il a été l'époux, avant de se remarier avec la comédienne Nelly Borgeaud. Avec elle, il aura deux enfants, Louis et Isabelle.