Les déboires multiples de Scott Weiland - drogue essentiellement, mais aussi violences conjugales et troubles bipolaires - ne sont pas vraiment ce qu'on pourrait une révélation, pour les adeptes de Stone Temple Pilots, fameux groupe de hard rock de San Diego.
Mais, après le retour de son excellent frontman depuis 2008 (après cinq années de césure qu'il a consacrées à Velvet Revolver, groupe de Slash, et sanctionnées de deux albums remarqués - Contraband et Libertad - avant que "des jalousies et mesquineries de gonzesses" ne forcent son départ, selon ce qu'il confia en 2010), Stone Temple Pilots, ancienne marque phare du grunge à sa création dont le style a beaucoup voyagé depuis, est entré dans une nouvelle ère.
"Le type m'a violé. Ce fut rapide et désagréable."
L'album éponyme de 2010 (le premier depuis 2001) en a attesté, mais l'autobiographie que vient de faire paraître Scott Weiland va beaucoup plus loin dans l'aspect "tourner la page" : le chanteur, auourd'hui âgé de 43 ans, y revient sur certains aspects brutaux de son adolescence, et notamment le viol dont il a été victime à l'âge de 12 ans, abusé par un élève plus âgé de son école.
Dans Not Dead and Not for Sale, son autobiographie parue ce 17 mai outre-Atlantique, Scott Weiland raconte, comme le relève le site québécois showbizz.net : "C'était un gros gars musclé, un finissant du secondaire qui prenait le bus avec moi chaque jour pour aller à l'école. Il m'a invité chez lui. Le type m'a violé. Ce fut rapide et désagréable. J'avais trop peur de raconter cela à qui que ce soit. 'Dis-le et tu n'auras plus d'amis à l'école ; je ruinerai ta réputation', m'avait-il menacé. J'avais rayé ce souvenir de ma mémoire. C'est revenu il y a quelques années lorsque j'étais en désintoxication. La thérapie a cet effet-là."
Ce n'est pas le seul traumatisme de Scott Weiland. En 2005, dans une interview à Esquire, il avouait avoir commencé à boire et à se droguer dès l'adolescence et ses premières expériences dans des groupes de rock, essayant très tôt la cocaïne - une découverte qualifiée de "sexuelle". Il avait également déjà fait mention de prises de drogues avec Courtney Love, avec qui il eut une brève relation à la fin des années 1990. La drogue, c'est ce qui allait emporter son frère, Michael, décédé d'une overose début 2007 et auquel les chansons For a brother et Pills, Demons & Etc, de Velvet Revolver, font allusion. Cette même année, Weiland retoucha à la cocaïne, mais il passe pour être désormais clean (plus d'héroïne depuis 2002), même s'il admet toujours des soucis avec l'alcool, malgré la surveillance d'un ami qui fait office de "parrain", au quotidien et en tournée : "J'ai juré, bien sûr, de ne jamais retoucher à l'héroïne, mais je n'imaginais pas que mon pire cauchemar serait en fait l'alcool - qui est légal", témoigne-t-il.
"D'accord, je me suis débattu dans l'héroïne et la cocaïne. Les gens ont une mauvaise perception de moi."
Côté sentimental, Scott Weiland a été marié et divorcé deux fois : la première, avec Janine Castaneda (de 1994 à 2000), la seconde avec le mannequin Mary Forsberg (2000-2007), qui lui donna deux enfants (Noah et Lucy) et avec qui il demeure en bons termes. Mary, également atteinte de troubles bipolaires, avait elle-même fait paraître ses mémoires en 2009 : Fall to Pieces: A Memoir of Drugs, Rock 'n' Roll and Mental Illness. Leur rupture lui avait inspiré quelques-unes des chansons de l'album Happy in Galoshes, son second album solo paru en 2008 (Scott Weiland met actuellement la dernière main à sa troisième album solo, prévue pour l'automne). "Mary m'a appelé pour me remercier pour les choses que j'ai écrites sur elle", confiait il y a quelques jours le rockeur. "Cela ne sert à rien de chercher la vengeance." Et de poursuivre : "Les gens ont une mauvaise perception de moi. D'accord, je me suis débattu dans l'héroïne et la cocaïne, et j'étais une grande rockstar. Mais la musique n'est pas ce qui me définit. Je suis un frère, un père, un fils et une homme qui a été amoureux de très peu de femmes. Mary était le grand amour de ma vie, hélas, cela a dû finir." Aujourd'hui, il avoue avec discrétion "des sentiments forts" pour quelqu'un.
Revenant sur sa trajectoire, il se demande ce qui serait arrivé (ou pas) s'il était resté dans l'Ohio, où il était un jeune Américain modèle, si ses parents n'avaient pas déménagé pour le sud de la Californie, où il a chopé le virus du rock et ses cousins avec - baptisés héroïne, cocaïne... A tout peser, il troquerait bien les nuits ques ses parents ont passées sans pouvoir trouver le sommeil, à se demander ce que fabriquaient leurs rejetons tandis qu'ils se droguaient...
Devenu rockstar, et en voie d'exorciser ses démons, souhaitons qu'il ne reste que le meilleur, tant le bonhomme, qui a lancé une ligne de vêtements (Weiland for English Laundry, avec le créateur Christopher Wicks) et compte s'essayer au chant de Noël à la sauce jazz, est pétri de talents. Un ponte du Rolling Stone US a eu cette formule plutôt heureuse : "Il a ce côté "quand Jim Morrison rencontre Eddie Vedder", et il est tout simplement fantastique sur scène. Malheureusement, il est têtu et ne sait pas faire de compromis, sans parler du fait qu'il fait partie de ces rockeurs célèbres dans l'histoire pour avoir le don de toujours réussir à tout foutre en l'air."
Not Dead and not for sale, une énième histoire de rockstar. Mais toutes sont particulières.
G.J.