Ames sensibles... aux merveilleuses - et indécentes - possibilités du corps humain, ne surtout pas s'abstenir : du 6 au 24 janvier 2016, l'excès sera la norme au Casino de Paris, qui accueillera The Hole, un spectacle burlesque totalement déluré, totalement inclassable, et totalement... interdit aux mineurs de moins de 12 ans. Caliente ? Non, pire.
Depuis 2011, la fièvre libertine engendrée par les "amours tumultueuses d'une maîtresse de cérémonie avec un rat" a saisi Madrid et toute l'Espagne, culbutant pas moins de 750 000 spectateurs dans un monde sans aucun tabou, peuplé de personnages dépourvus de toute inhibition et habité d'extravagances, d'humour et de nudité. La France, réputée pour sa gauloiserie et sa grivoiserie patrimoniale, va avoir l'opportunité de succomber à son tour et de pénétrer dans l'univers de The Hole. Et pas par le trou de la serrure ; non, en géant ! Proposée dans l'Hexagone par Indigo Productions (spécialiste de la chanson française - Renaud, Patrick Bruel, etc. - qui a opéré une mutation très convaincante du côté des projets artistiques "dépaysants" - Irish Celtic, Soy de Cuba ou encore Bollywood Express), la création originale de l'audacieuse société madrilène Letsgo Company ne saurait être réduite à un freak show relevant du concours d'obscénités : cirque, théâtre et comédie s'y entremêlent intimement et spectaculairement dans un esprit de jouissance décomplexé.
Devant une bouche gourmande et goulue, d'acrobaties et de voltige en effeuillages effrontés, d'une cascade de corps à des cascades de rires, une galerie de personnages no limit jouent les funambules sur le fil de la transgression et du plaisir qui l'accompagne, sans jamais tomber dans la vulgarité. Un tour de force qui ne doit rien au hasard, mais plutôt à la collection de talents et l'envergure remarquable des artistes en scène, passés par des références mondiales du spectacle vivant (Cirque du Soleil, festivals...). Habillés (et déshabillés) par le styliste Nicolas Vaudelet (qui collabora avec Jean Paul Gaultier, Givenchy, Vuitton, Madonna ou encore Franco Dragone pour la nouvelle production du Lido), ils se rangent derrière la tonitruante Pepa Charro, alias La Terremoto de Alcorcón ("le tremblement de terre d'Alcorcon"), une chanteuse et comédienne décalée bien connue des Espagnols notamment pour ses parodies (Madonna, Kylie Minogue, Britney Spears) et apparue chez Almodovar (Les Amants passagers), pourvoyeur de figures féminines marquantes. Celle de la maîtresse de cérémonie de The Hole, pourfendeuse de la morale au nom de la jouissance, en est assurément une - la bande-annonce du show en donne un avant-goût savoureux...
(Ré-)Jouissance supplémentaire pour les spectateurs français, elle partagera sa mission avec un comédien français pas loin d'être aussi caméléon qu'elle, en la personne de l'excellent Guillaume Carcaud : celui que beaucoup connaissent forcément sous les traits de... Chantal, la copine brune de l'irrécupérable blonde Samantha oups ! dans le programme court humoristique créé et joué par David Strajmayster), se révélera sous un nouveau jour saisissant, à mille lieues de ses performances théâtrales et de son rôle récurrent dans la saga télé Alice Nevers, le juge est une femme. Côté made in France, on remarquera que l'adaptation du script a été confiée au scénariste, réalisateur et comédien Frédéric Proust, ancien pilier - dans l'ombre - de H et Caméra Café remarqué au grand écran dans Safari et Essaye moi avant de réaliser en 2013 12 ans d'âge, avec François Berléand et Patrick Chesnais.
L'érotisme vénéneux de Madame (Vinila Von Bismark) et l'androgyne perversité de Pony Loco (Nacho Sánchez) promettent des strip-teases qu'il sera difficile d'oublier, à l'instar des courbes aguicheuses que Gynoid (Marta Torres) fera danser tout en fluorescence... Les Majordomes (Toni Valles, Carlos Valledor, Arnau Lobo, Victor Genestar) donneront de la voix tandis que les virevoltantes Supernenas (Arantxa Fernández et Mónica Riba) et l'apollon voltigeur Supergold (Charlie Plaçais) donneront des frissons. En bas, La Boule Rouge (Julio Bellido) restera de bout en bout un mystère envoûtant.
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G.J.