Noir Désir est mort, mais The Hyènes se tape la cloche. En attendant un album à paraître à l'automne, c'est l'élection du prochain pensionnaire de l'Elysée qui régale : The Hyènes aboie, mord et rit jaune, la caravane présidentielle passe...
Le groupe punk rock mené par Denis Barthe, ex-batteur de Noir Désir jusqu'à sa désintégration tourmentée fin 2010, a saisi l'opportunité fournie par le résultat des urnes du premier tour pour dévoiler un morceau inédit taillé sur mesure pour la circonstance : Nazillon de nuit. Comme s'il s'était préparé au record historique du FN (17,9 % des voix, 6,4 millions de votants).
Fondé en 2005 par Barthe, qui s'est entouré du guitariste de Noir Dez' Jean-Paul Roy, d'Olivier Mathios (basse) et de Vincent Bosler (guitare, chant) afin d'honorer la commande d'Albert Dupontel pour le film Enfermés dehors (d'où le nom The Hyènes, inspiré par Bernie), The Hyènes fait entendre son ricanement grinçant dans l'entre-deux tours et fustige le vote frontiste.
Sur une ironique tendre musique, The Hyènes, malgré un titre qui pouvait presque laisser espérer un peu de subtilité et de métaphore, empile les clichés au premier degré (voire au degré zéro), accumule les amalgames et entasse les platitudes pour partager de manière cinglante sa véhémente désapprobation face à la montée de l'extrême-droite, quitte à insulter à mots découverts les quelque 6,4 millions de Français directement concernés : "Tu es un connard et le resteras." Une manière de défier ce 1 votant sur 5,5, ce "nazillon tombé du nid" que The Hyènes "croise souvent sans le savoir" et qui profiterait abusivement du "secret de l'isoloir" pour commettre son forfait.
On peut bien sûr partager ce point de vue et adhérer à l'intention. Mais quant à la forme du message... Etre inquiété et opposé de toutes ses forces à la poussée de l'extrême-droite est-il une position si "rare" qu'elle justifie de profiter de son statut d'artiste pour ce genre de diatribe ? Noir Désir justement, paix à son âme, avait la culture de messages tout aussi virulents mais ô combien mieux développés. Ce n'est vraiment pas la partie la plus glorieuse de la démocratie ; et, toutes considérations politiques mises à part et d'un strict point de vue musical, cette sortie de The Hyènes est bien dispensable. Certes opportuniste, était-elle seulement opportune (à l'heure où cette part électorale est courtisée de bâbord et de tribord) ?
Reste à espérer des thèmes, des compositions et des mots plus inspirés sur l'album de The Hyènes enregistré au printemps 2012 avec Ted Niceley (Noir Désir, Fugazi, Girls against boys) et attendu à l'automne, trois ans après un premier album éponyme.