A l'été 2009, au sein du cortège de célébrations et d'hommage tous azimuts au regretté King of Pop Michael Jackson, décédé le 25 juin (les circonstances de sa disparition sont toujours sujettes à caution), une vidéo se démarquait, baptisée ABC Generations.
Signée du MC et photographe français Kares et mettant en scène quelques stars de la scène urbaine dont l'excellent Souleymane Diamanka, cette réalisation tribute s'habillait d'un remix étonnant du cultissime ABC des Jackson 5 - une version particulièrement épurée, totalement réinventée autour d'un instru piano simplissime et vibrant qui disputait la vedette à la voix du jeune Michael.
L'orfèvre de cette relecture aussi attrayante qu'improbable, Woodini, n'en était pas à son coup d'essai, et cet ABC planant aux saveurs de légende constituait en réalité le coeur d'un concept-album (My Soul, My Hip-Hop, My Remix) détournant, remodelant et réinventant audacieusement et élégamment des standards de la hip hop soul music.
L'artiste parisien, connu pour ses travaux sonores au sein du team Rimsland et du studio 555Lab, dessine un panorama musical riche en riffs, boucles et climats, dont le cocktail d'ambient planant et de vibe hip hop peut attirer les comparaisons (élogieuses) avec les travaux d'ensembles comme The Herbaliser...
Entrée en matière hip lounge avec I think I love u feat. Dwele, puis une relecture intensifiée du soulistique Heaven du formidable John Legend, une version totalement glamour du culte What about us? de Brandy allégé de son beat surpuissant, un génialement disloqué et jazzy Listen!!! de Talib Kweli, l'incontournable girl power de Gwen Stefani sur Hollaback girl s'emplit de gimmicks et se gave de basses dans sa seconde vie remixée...
Après l'acmé du ABC des Jackson Five, un autre remix d'un sommet de la soul érigé sur un instru piano surfin (I do not want I haven't got de Betty Lavette) captive l'attention, avant que le Hurry on now d'Alice Russell, peut-être la restructuration la plus envoûtante de ce concept-album, réinjecte de l'adrénaline. Idéal pour aborder le samplage doublon de Common, invité deux fois, pour un sirupeux Come close (closer) qui aurait sa place au côté des sensuels tracks R'n'B d'un Joe, puis en partage avec Bilal sur Love it/Come close pour un pan d'ambient rythmé, qui cède finalement la place à la vibe hip hop de Styles P (Who want a problem).
Après un tel parcours, la réinvention du She don't de LeToya paraîtra hélas fadasse, heureusement rachetée par un final emprunté à Van Hunt, Down here in hell (with you), qui compile avec science et sensualité les qualités essentielles de ce projet - travail de boucles, goût pour les riffs bien dosés, groove dopé par les lignes de basse, aventures planantes et tournoyantes, audace de se laisser aller plutôt que de presser.
My soul, my Hip-Hop, my Remix, téléchargeable gratuitement sur le site de Woodini.