Près de trente-cinq années séparent les affaires Sophie Le Tan et Françoise Hohmann, mais un seul homme les relie dans la douleur : Jean-Marc Reiser. Devant la cour de justice de Strasbourg pour l'assassinat de l'étudiante Sophie, il a aussi été le dernier à avoir vue vivante Françoise, à l'époque et dont le corps reste introuvable. Il avait été traduit en justice mais a fini par être acquitté. Thierry Moser, avocat de la famille Hohmann jusqu'en 2020, voit dans ces similitudes le signe "d'une espèce de signature, comme un modus operandi," lit-on sur franceinfo.
Les proches de François Hohmann relèvent les points communs entre les deux jeunes femmes : Sophie Le Tan fêtait à peine sa vingtième année, François Hohmann avait 23 ans, elles étaient toutes deux de jolies brunes et jolies. Mais surtout les circonstances de leur disparition se font écho : La première visitait l'appartement de Jean-Marc Reiser, la seconde faisait du porte à porte comme démarcheuse commerciale. Les traces de l'existence de Françoise s'arrêtent là, au rez-de-chaussée d'un bâtiment. La police avait fait rapidement le rapprochement avec Reiser mais il a fait l'objet d'un non-lieu en 1992 car rien ne permettait de le confondre.
Dix ans plus tard, Jean-Marc Reiser est interpellé lors d'un contrôle de routine des douaniers. "Ces derniers découvrent dans sa voiture un arsenal d'armes de poing, un fusil à pompe, des cagoules, des stupéfiants, et surtout des photos de femmes visiblement inconscientes, dans des positions sexuelles dégradantes", écrit franceinfo. De quoi donner une autre image de lui quand a disparu Françoise Hohmann.
L'image irréprochable dont jouissait l'ancien étudiant de l'Institut régional d'administration de Bastia au moment de la disparition de Françoise Hohmann est sérieusement ébranlée, il est désormais considéré comme un prédateur sexuel. Il est mis en examen pour deux viols commis en 1995 et 1996 : celui d'une ancienne compagne, identifiée sur les photos, et celui d'une auto-stoppeuse allemande. En 2001, il est condamné par les assises du Doubs à 15 ans de réclusion. Sa condamnation pour viol cette année-là ravive l'espoir de la famille de Françoise de déterminer le coupable. Cependant, le dossier Hohmann reste mince, le corps de la victime est introuvable et la police scientifique n'a pas pu faire grand-chose en 1987 : Jean-Marc Reiser est acquitté faute de preuves en 2001.
Fanny Mehauden, nièce de Françoise Hohmann, a tenté de relancer le dossier sur sa tante à la lumière de la disparition de Sophie Le Tan. L'avocat Thierry Moser a demandé des poursuites non pour "homicide", le verdict étant définitif, mais pour "recel de cadavre", ainsi qu'une réouverture de l'information judiciaire pour "séquestration". Ses armes sont la condamnation pour viols de Jean-Marc Reiser en 2001 qui fait de lui un véritable prédateur, l'affaire Sophie Le Tan et enfin les progrès scientifiques : le dossier est réouvert. Le père de la disparue est mort au mois de mai dernier, sans avoir de nouveau verdict mais sans jamais s'arrêter de se battre pour sa fille.