Les beaux rôles féminins sont rares dans l'industrie hollywoodienne, immobilisée par un sexisme increvable. Les réalisateurs se retrouvant face aux mêmes choix en matière d'actrices bankable sérieuses, les mêmes noms ressortent inlassablement du chapeau des studios, visiblement convaincus que le public n'en a pas marre. Parmi cette courte liste où s'entrechoquent Natalie Portman, Reese Witherspoon, Rachel Weisz, Michelle Williams, Eva Green, Diane Kruger, Scarlett Johansson, Keira Knightley, Olivia Wilde ou encore Carey Mulligan, toutes capables d'assurer dans une superproduction, la discrète Amy Adams remporte bien souvent la mise.
Three times
Hasard ou destin, l'actrice de 38 ans est attendue dans trois films aux antipodes, réunis dans la liste des événements des prochains mois : The Master de Paul Thomas Anderson, Trouble with the Curve avec Clint Eastwood et Man of Steel, le reboot de Superman réalisé par Zack Snyder. En compétition avec Reese Witherspoon pour les deux premiers, Amy Adams s'est payé le luxe de remporter les deux rôles, ce qui lui a certainement permis de décrocher une nomination aux prochains Oscars. Pour incarner Lois Lane, le rôle le plus convoité de la saison, elle a carrément battu Mila Kunis et Jessica Biel, nettement plus connues et appréciées du public. Une preuve que la couverture médiatique peut aussi se révéler problématique pour les auteurs, capables de dissocier la personne publique de la comédienne.
Nommée trois fois aux Oscars, Amy Adams a entamé son ascension fulgurante il y a une dizaine d'années seulement. Aperçue dans Belles à mourir (1999) avec Kirsten Dunst et Psycho Beach Party (2000) avec Lauren Ambrose, elle explose dans la comédie dramatique indé Junebug (2005) dans laquelle elle incarne une femme enceinte à côté de la plaque. Une performance illuminée qui la propulse sur le devant de la scène et la pousse jusqu'aux Oscars - Rachel Weisz remportera la statuette. Capable de porter un film sur ses épaules, elle chantonne dans la comédie Il était une fois (2007) en princesse décalée, nettoie les scènes de crimes dans Sunshine Cleaning (2008) avec Emily Blunt et s'amuse avec Ben Stiller dans La Nuit au musée 2 (2009). Mais c'est auprès de Meryl Streep qu'elle confirme son potentiel, d'abord en nonne naïve dans Doute (2008) pour lequel elle est nommée une deuxième fois aux Oscars, puis en cuisinière dans Julie & Julia (2009). Lors de la cérémonie, elle est assise au premier rang avec la comédienne multi-oscarisée, symbole de sa réussite sociale dans l'arène hollywoodienne.
Hormis l'inédit The Muppets (2011) qui a cartonné aux Etats-Unis, Amy Adams a affirmé son désir de brutalité avec un rôle de serveuse masculine dans Fighter (2010) avec Mark Wahlberg. Contre toute attente, sa partenaire Melissa Leo lui "vole" son Oscar du meilleur second rôle. Apparue en arrière-plan de Sur la route avec Kristen Stewart, elle prépare cependant une contre-attaque sensationnelle qui commencera par son duel père-fille avec Clint Eastwood dans Trouble with the Curve, un drame sur un entraîneur de base-ball qui perd la vue et décide de recruter un dernier athlète, tout en se réconciliant avec sa fille. Elle sera ensuite au coeur du brûlant The Master avec Joaquin Phoenix et Philip Seymour Hoffman, récit à peine caché de la naissance de la scientologie où elle incarnera la première adepte de son mari. Et dans le cas où ces films resteraient cantonnés au cinéma d'auteur, elle décrochera l'attention de la masse dans son premier blockbuster au côté de Superman dans Man of Steel prévu pour l'été 2013. Sans compter sur le nouveau film de Spike Jonze avec Joaquin Phoenix, Rooney Mara, Olivia Wilde et Samantha Morton, ainsi que ses retrouvailles avec David O. Russell pou un drame sans titre avec Jeremy Renner et Bradley Cooper. L'exemple probant d'une carrière hollywoodienne débarrassée de tous les excès de la célébrité.
Trouble with the Curve, en salles le 21 novembre.
The Master, en salles le 9 janvier 2013.
Geoffrey Crété