En plus de 35 ans d'une carrière dont il n'a jamais laissé la philosophie taiseuse dévier, son père s'est attiré beaucoup de roses, des lauriers aussi (comme cette Grande médaille de la chanson en 2010), et presque pas d'orties. A bientôt 25 ans, Aurélie Cabrel n'aspire qu'à une chose : éclore par elle-même et cultiver à son tour son jardin musical.
C'est toujours la même rengaine : quand on a déjà un nom, il n'y a plus qu'à se faire un prénom. Mais la demoiselle, qui s'apprête à publier dans quelques mois, le 17 octobre 2011, son premier album, élaboré avec la bénédiction de papa Francis mais sans son assistance, assume les deux. Tenir à conserver son patronyme, quand d'autres ont choisi de le gommer pour naître autrement (M, Arthur H, Ours...), peut sonner comme un gage de confiance : car il faut le mériter.
En 2009, interrogé sur un éventuel album de reprises, Francis Cabrel constatait dans les colonnes de Nice-Matin : "Finalement, j'aime trop créer mes propres trucs pour me plonger trop longtemps dans l'univers des autres." Pour sa grande fille, un des trois enfants qu'il a eus avec son épouse, c'est pareil. Le single-titre de son album à venir, Oserais-je ?, en témoigne : elle ose à la fois s'appeler Cabrel, faire de la musique, et se montrer prête à imposer son identité artistique. "Oserais-je ?", c'est au conditionnel, pas au futur : une forme de pudeur introspective et de toc toc discret à la porte du showbizz, une manière de ne pas se rendre coupable d'effronterie, un moyen de substituer au parricide la filiation.
Désormais, on ne parle plus de baccalauréat, mais bien de promo en bonne et due forme (l'agence Waaa s'en charge notamment). Après avoir travaillé pour la société paternelle Chandelle Productions (qui produit l'album, distribué par Sony), il est temps de défendre ce qu'elle a minutieusement concocté avec un compagnon de route qu'elle a choisi, le Belge Esthen, découvert lors des Rencontres d'Astaffort qui tiennent tant au coeur de Francis Cabrel et auxquelles il avait incité sa fille à participer après avoir découvert ses textes.
Le Nouvel Observateur s'était intéressé à elle, ainsi qu'au fils de Maxime Le Forestier, il y a quelques mois, et n'a pas perdu le fil de l'histoire. Des cinq titres que le journaliste du magazine a pu écouter en avant-première (J'ai cherché, Dix doigts de la main, Oserais-je, Abracadabra et De l'homme à l'animal), il retire cette analyse : "Ce n'est pas une question d'équilibre, comme le dirait Francis, mais de goût. Que ceux qui attendent des histoires de cailloux ou de fille en robe légère qui grimpe à un arbre passent leur chemin qui ne les conduira pas forcément à la cabane au fond du jardin. L'orchestration est bien rock hexagonal, la voix ne fleure pas le dessous de la Loire : Aurélie Cabrel a son univers à elle."
Le commun des mortels peu d'ores et déjà découvrir, en cliquant ici, un extrait de J'ai cherché, qui offre une voix au caractère insaisissable, un peu à l'image du bleu profond du regard, et une écriture affirmée, élégante.
L'argumentaire promet un album qui, s'il est fait à la campagne, ne sera ni bucolique, ni acoustique. "Non pas un produit régional de la région d'Agen, mais plutôt du rock hexagonal en 220 volts." A suivre...