Le 15 septembre 1973, le prince Carl Gustaf devenait le 68e roi de Suède, au décès de son grand-père le roi Adolf VI, et était officiellement intronisé quatre jours plus tard, le 19 septembre, prenant le titre de Sa Majesté Carl XVI Gustaf, roi de Suède en abandonnant le très long titre traditionnel utilisé par les précédents souverains depuis l'établissement de la monarchie en 1544 - une innovation majeure qui sera même un socle pour sa devise personnelle, "Pour la Suède - En notre temps". Tout au long de l'année 2013, le chef de la Maison Bernadotte, qui fêtera son 67e anniversaire le 30 avril prochain (tandis que la reine Beatrix des Pays-Bas, le même jour, abdiquera), célébrera ses 40 ans de règne.
La site de la Maison royale vient de déclencher le processus en dédiant une page à ce jubilé - que son homologue danoise la reine Margrethe II célébrait, elle, en 2012 -, où figure notamment l'agenda des visites officielles du couple royal dans tous les comtés (21) de la Suède. En header, un double portrait présente le jeune roi Carl Gustaf, à 27 ans, regardant vers la droite (symbolisant l'avenir), et, quarante ans plus tard, celui qu'il est devenu, le regard vers la gauche (le passé). Un face à face fort qui met en exergue le chemin parcouru, que le souverain évoque dans un long entretien publié au même endroit.
Une interview dans laquelle il n'est nullement question d'abdication ni de passage de flambeau au profit de sa fille la princesse héritière Victoria de Suède, jeune maman zélée et irréprochable qui jouit d'une très forte cote de popularité auprès de l'opinion suédoise, globalement très attachée à sa famille royale. S'il ne semble pas incongru que le sujet ne soit pas évoqué, sachant que 2013 sera une année de célébration d'un cap important et sachant aussi que le roi a déjà affirmé dans le passé qu'il n'abdiquerait pas, l'absence totale de mention de la princesse Victoria a tout de même quelque chose d'étonnant...
Scandales mis à part - notamment sa dyslexie, soupçonnée par les journalistes dès son accession au trône lors de la signature d'un document officiel et jamais admise jusqu'à une interview de son épouse la reine Silvia en 1997, et les révélations faites en 2011 par un ouvrage sur son passé supposément libidineux -, le roi Carl XVI Gustaf, orphelin de son père Gustaf V, tué dans un crash d'avion alors qu'il n'avait pas encore 1 an, a incarné une forme de renouveau de la monarchie suédoise, qui s'est sous son impulsion inscrite dans un réel effort de modernisation. Un effort nécessaire pour continuer à représenter à bon droit la Suède, nation d'innovation.
Dans l'entretien qu'il a accordé fin janvier dans son bureau, au palais royal Drottningholm, le roi Carl XVI Gustaf de Suède constate que ces quarante années sont "passées étonnamment vite". A la question de savoir ce qu'il attend de ce jubilé, il répond : "Que ce soit un jalon important, une plate-forme pour regarder vers l'avant, mais aussi vers l'arrière. 40 ans, c'est vraiment considérable, et beaucoup de choses se sont passées. A mon accession au trône, j'étais relativement jeune, 27 ans, et je voyais le monde avec l'expérience d'un homme de 27 ans. 40 ans plus tard, j'ai une banque d'expériences... Et le monde a bien changé (...) On dit souvent en plaisantant que c'était mieux avant, mais ce n'est pas le cas. Le monde peut devenir un meilleur endroit à vivre pour la majorité, il y a encore beaucoup de pauvreté et de détresse."
Revenant sur la manière dont il a modernisé, déjà dans son organisation, la monarchie, reprenant le flambeau de son grand-père qui régna jusqu'à 92 ans (et lui conseilla de regarder la vie avec un certain sens de l'humour, sans doute de crainte que sa charge l'écrase, analyse a posteriori Carl Gustaf) et introduisant la consultation dans le processus du règne pour servir un voeu de transparence, le roi en exercice a également voulu expliquer comment il a "essayé de vivre en harmonie avec l'évolution de la Suède et du monde autour", mais aussi d'incarner "un chef neutre et apolitique capable de rassembler".
L'entretien s'achève sur des questions d'avenir. L'occasion pour celui qui est le président d'honneur de la Fondation mondiale des scouts de mettre en avant son intérêt pour le rôle de la technologie dans le futur de l'humanité et son souci de léguer une planète en bon état pour les générations suivantes.
G.J.