"Je suis un cinéaste plus intime et personnel que Kubrick." Tels sont les mots, un brin prétentieux, lâchés par David Cronenberg lors d'une rétrospective dédiée au brillant cinéaste canadien à Toronto. Cronenberg, digne héritier de Stanley Kubrick ? Le réalisateur de Faux-semblants et A History of Violence n'est pas d'accord.
En toute franchise, d'un ton direct, David Cronenberg n'a pas été tendre avec le regretté metteur en scène de 2001, Full Metal Jacket ou encore Orange Mécanique. Cronenberg, spécialiste de la destruction des corps, "trouve que Shining n'est pas un grand film". Étonnante remarque à propos du cinéaste de l'étrange érigé en véritable modèle pour le cinéma de genre. "Je ne pense pas qu'il comprenait le genre de l'horreur, poursuit-il. Je ne pense pas qu'il comprenait ce qu'il faisait. Il y avait quelques images frappantes dans le livre, et il a obtenu cette horreur, mais je ne pense pas qu'il l'a vraiment ressentie", concède le Canadien à qui l'on doit le récent Cosmopolis.
Cronenberg, le cinéaste de l'intime, croit savoir que Kubrick a réalisé Shining dans un esprit commercial, ratant l'essence même du roman éponyme The Shining de l'écrivain américain Stephen King. Le thriller, sorti en salles en octobre 1980, suit en huis clos Jack Torrance (mythique Jack Nicholson), gardien d'un hôtel fermé l'hiver, sa femme et son fils Danny. Ce dernier, qui possède un don de médium, le "shining", est effrayé à l'idée d'habiter ce lieu, théâtre marqué par de terribles événements passés...
David Cronenberg semble, lui, bien sûr de son fait : "Bien qu'il soit vénéré comme un artiste de haut niveau, je pense qu'il avait un esprit beaucoup plus commercial et cherchait des trucs qui cliquent, pour lesquels il pouvait obtenir du financement. Je pense qu'il a été très obsédé par cela, contrairement à moi. Ou à Bergman ou à Fellini."
Toutefois, ce n'est pas la première fois que le film culte de Stanley Kubrick est la cible de critiques virulentes émises par des grands noms de la culture horrifique. Le mois dernier, Stephen King, l'auteur du roman, avait notamment critiqué la vision de Stanley Kubrick du personnage de Wendy (Shelley Duvall), assurant qu'il s'agissait d'un "des personnages les plus misogynes jamais mis dans un film [...] essentiellement là pour crier et être stupide".