"Anywhere, anytime, I'll be ready to perform/My stupid songs about nothing/Nothing but my soul/Anywhere, anytime, I'll be ready to succeed/To give you all my energy/I wanna make you dance" : Boogers ne cache pas son jeu, mais ne laisse pas de surprendre pour autant. Dès les premiers mots de son nouvel album, As clean as possible (label AT(h)OME), à paraître le 15 mars, accompagnés par des accords vibrants et positifs de folk hippie gentillette qui cache inévitablement quelque chose de bluffant, l'étrange barbu à l'étrange pseudo (en jargon anglo-saxon, Boogers, c'est... "crottes de nez") annonce son programme tout en introduisant ses paradoxes.
Chez lui, c'est le bordel organisé, comme l'indique le visuel de son album. Ce qui, musicalement parlant, est synonyme d'harmonie alchimique, de luxuriance ludique, d'impertinence mélodique, d'efficacité méthodique. Homme-orchestre aux références insondables (Ramones, Beastie Boys, Weezer, The Streets...) et a priori inconciliables, Boogers prouve avec As clean as possible qu'on peut en faire le plus possible... proprement. Quand l'inconcevablement foutraque devient brillante réalisation démoniaque.
Celui qui a laissé des traces dans sa région tourangelle sous le nom de Chacha, que ce soit à l'antenne de la radio rock Radio Béton ou lors des DJ-sets qu'il a dispensés, n'en est pas à son coup d'essai : ceux qui ont bien voulu entrer dans l'atelier musical de son premier maxi ou de son premier album, In the step, n'ont pas tardé à comprendre que ce "fourre-tout" est un bric-à-brac extrêmement pertinent et percutant : "hip-hop foutraque, garage-rock déglingué, pop synthétique ludique ou ultra-élégante" bien dosés au programme.
Le bricolage inspiré se poursuit donc avec As clean as possible : la chanson d'ouverture glisse du hippie pop à une rythmique légèrement Coffee & TV de Blur, puis s'épaissit de claps et d'une guitare overdrive en plus de quelques bidouillages ; I trust you instaure une ambiance de trip hop surnaturel hanté par une voix râpeuse que des... choeurs d'enfants viennent rejoindre, et qui bascule sur un son électro-pop épais de synthétiseurs et de beat clinquant ; I lost my lungs s'embarque dans un style de musique vocale digne de Fredo Viola qu'un piano quasi honky tonk et un cuivre égaré viennent garnir - lorsqu'ils se taisent, on découvre une pop rappée savoureuse comme celle des Naive New Beaters ; Put your head ou le rock californien qui tousse serait parfait sur une galette de Weezer ; l'énervé Talk to Charlie impose sa rythmique accaparante, de quoi finir exsangue ; Someday conjugue intro vocale Queenesque et développement ample et vibrant comme un Springsteen (Born in the USA), puis s'autorise des bridges de cuivres et de sèche avant d'emballer le tout sur un son bondissant auquel Alphabeat ne serait pas insensible... Et vous n'êtes encore qu'à la moitié du chemin. Pour le reste, l'aventure vous attend. Histoire de vous mettre en confiance, nous vous proposons quelques clips, drôles, inventifs et percutants, à l'image de la musique qu'ils accompagnent.
Programmé sur les ondes, notamment sur France Inter où il sera l'invité de Sous les étoiles exactement (nit du 15 mars) et du Fou du Roi (19 mars), à découvrir dans la pastille CD Aujourd'hui (15 mars), Boogers promet une expérience hors du commun sur scène, ce que Fred Landier, qui en a brossé, non pas la barbe, mais le portrait, confirme : "S'il est tout seul sur scène, on ne lui demande pas pourquoi car il répondra à coup sûr que celle-ci est trop petite pour accueillir tous les musiciens des ses rêves. Et puis avec son micro, sa guitare, son synthé et sa platine, Boogers prend déjà une place folle... Bon, l'autre question qu'on ne lui posera pas ? S'il aura une barbe ou pas. Parce que ça, on s'en fout pas mal, et, de toute façon, on adore qu'il nous surprenne".
Pour les dates (notamment les immanquables Bikini de Toulouse, Cargo de Caen et Maroquinerie de Paris), direction son MySpace.
Guillaume Joffroy