Il y a près de trente ans, François Truffaut disparaissait. C'était le 21 octobre 1984 et ce triste anniversaire rappelle, si besoin était, la grandeur du parcours de cet artiste français exceptionnel. Durant le Colcoa, festival du cinéma français à Hollywood, les États-Unis rendent hommage au metteur en scène qui séjournait souvent à Los Angeles. En effet, les films de Truffaut fascinaient le Nouvel Hollywood, mené par Coppola, Spielberg, Lucas, Friedkin ou encore Scorsese... C'est sa fille Laura qui parlera de lui, au côté de Claude Lelouch et Serge Toubiana, président de la Cinémathèque française, lequel présentera à l'automne une grande exposition sur le cinéaste.
Laura (55 ans), l'une des trois filles du réalisateur, est installée depuis trente ans en Californie, un État où son "père était très apprécié dans les années 70", se souvient-elle, dans un entretien accordé à l'AFP. "Les studios passaient leur temps à lui proposer des choses", ajoute-t-elle. Sa mère est Madeleine, fille d'Ignace Morgenstern, propriétaire de la société de distribution cinématographique Cocinor. Et ses parents, qui auront une seconde fille, Eva (53 ans), divorceront en 1964.
François Truffaut et Hollywood
Mais s'il y était tant réclamé, pourquoi François Truffaut n'a-t-il jamais tourné à Hollywood ? "Il n'avait pas eu une bonne expérience en Angleterre sur le tournage de Fahrenheit 451, explique Laura Truffaut. La difficulté avec la langue comptait beaucoup pour lui, c'était un gros obstacle. Autant il aimait profondément le cinéma américain, autant il se doutait bien qu'un metteur en scène aux États-Unis n'a généralement pas le contrôle qu'il peut avoir en France. Et je crois que c'est quelque chose qui le troublait."
C'est devant la caméra de Steven Spielberg qu'on le verra, dans Rencontres du troisième type en 1977, dans la peau du professeur Lacombe. "Être acteur sur le film de Spielberg lui a permis d'observer le système des studios de très près, la lourdeur des mécanismes et de la hiérarchie", dit-elle. "Mais il a beaucoup aimé cette expérience en tant qu'acteur", entre les mains d'un réalisateur qu'il appréciait et dont il se savait apprécié. "Spielberg et mon père partageaient le plaisir de diriger des enfants. D'ailleurs, Spielberg parlait déjà de son projet de E.T., mais d'une manière très différente : il pensait alors que ce serait un petit film, observe-t-elle. Ils partageaient aussi le goût du récit, le plaisir de raconter une histoire, et avaient certaines influences en commun.""Il ne pouvait pas s'imaginer faire autre chose que du cinéma"
La fille de François Truffaut reviendra plus précisément sur le travail d'acteur de son père. Elle pense "qu'il devait aimer cela davantage qu'il ne voulait l'avouer". Pour L'Enfant sauvage (1969), où il interprète le rôle du Docteur Itard, "il a longtemps dit qu'il considérait que le rôle essentiel était celui de l'enfant et qu'il serait injuste d'engager un acteur adulte qui se sentirait frustré d'être en permanence en retrait. Personnellement, je pense qu'il avait très envie de jouer ce rôle. Il ne voyait personne à sa place. Sans doute aussi parce qu'il y avait chez mon père un goût indéniable pour la pédagogie, très perceptible dans L'Enfant sauvage".
François Truffaut "ne pouvait pas s'imaginer [faire] autre chose que du cinéma, indique sa fille. C'était sa passion, c'était son loisir, quand il avait du temps libre, il lisait et il allait au cinéma. C'était l'essentiel de ce qui l'intéressait dans la vie, et il ne pouvait pas concevoir d'autre métier."
À noter qu'un hommage à François Truffaut sera le point fort du 17e Festival du cinéma français de Cuba qui présentera vingt films du 2 au 25 mai à La Havane, comme l'ont annoncé jeudi ses organisateurs. Quatre films - Les Quatre Cents Coups, Jules et Jim, Le Dernier Métro, Vivement dimanche - du réalisateur de la Nouvelle Vague figurent au menu de ce festival qui s'ouvrira le 2 mai avec la projection de Comme des Frères, d'Hugo Gélin.