Après le récit d'Emma de Caunes, suivi de près par celui de Judith Godrèche, le cinéma français a fait irruption dans le scandale Weinstein. Depuis quelques jours, les langues se délient à Hollywood où de nombreuses actrices et femmes racontent comment elles ont été harcelées, agressées sexuellement voire violées pour trois d'entre elles, par Harvey Weinstein. Léa Seydoux, probablement l'une des stars françaises les plus populaires à l'international et notamment à Los Angeles, a également évoqué l'agression sexuelle dont elle a été victime.
Harvey Weinstein, en effet, ne se limitait pas à Hollywood. Le producteur américain adore la France, et il n'a jamais lésiné sur les moyens pour distribuer des films tels que La Reine Margot, Le Fabuleux Destin d'Amélie Poulain, Intouchables et bien évidemment The Artist et ses cinq Oscars. Chaque année, il venait à Cannes pour le Festival où sa réputation est apparemment un véritable secret de polichinelle.
Les hôtels – et notamment le Cap-Eden-Roc où il avait ses habitudes – et les loueurs de yachts le connaissent bien. Comme le rappelle Le Parisien, l'influent tycoon américain "organise des fêtes avec partouzes et cocaïne". Sur la Croisette, il est surnommé "le Porc". Apparemment, professionnels du cinéma comme journalistes avaient l'air de savoir, par des bruits de couloir, des rumeurs ou des récits véridiques, comment Harvey Weinstein ambiançait le Festival de Cannes côté coulisses. Dans le Guardian, on parle même du "Caligula de Cannes", référence au controversé empereur romain dont l'appétit pour les orgies fait la joie des historiens.
Cannes, c'est là que Judith Godrèche, 24 ans alors, est agressée. "Il s'est pressé contre moi et m'a enlevé mon pull", raconte-t-elle. Après avoir refusé de le masser, elle s'enfuit et se confie à Miramax, la société de Weinstein, qui la réduit au silence, "parce que c'est comme ça". Un récit qui n'a pas étonné Dominique Besnehard, ex-agent de stars qui n'a jamais été réellement confronté à Weinstein. Il dit toutefois avoir entendu "des actrices raconter qu'elles avaient été convoquées dans sa chambre et qu'elles étaient parties en courant", dénonçant chez lui ce "rapport de pouvoir digne d'un Pygmalion pervers".
De son côté, le Festival de Cannes a publié un communiqué de presse. "C'est avec consternation que nous avons découvert les accusations de harcèlement et de violence sexuelle récemment portées contre Harvey Weinstein, professionnel du cinéma dont l'activité et la réussite sont connues de tous, qui lui valent de séjourner à Cannes depuis de nombreuses années et d'avoir de nombreux films sélectionnés au Festival international du film dont il est une figure familière", écrivent conjointement Pierre Lescure et Thierry Frémaux. "Ces faits relèvent d'un comportement impardonnable qui ne peut susciter qu'une condamnation nette et sans appel. Notre pensée va aux victimes, à celles qui ont eu le courage de témoigner et à toutes les autres. Puisse cette affaire contribuer à dénoncer une nouvelle fois des pratiques graves et inacceptables", concluent le président et son délégué général.