Qui a pu oublier le professeur Strauss dans H ? Si l'on se souvient d'abord du trio infernal formé par Jamel Debbouze et Eric et Ramzy dans la fameuse série de Canal+, le personnage loufoque incarné par Jean-Luc Bideau était l'un des plus cultes et des plus appréciés des téléspectateurs. Sauf que, onze ans après l'arrêt de la série, le comédien de 73 ans n'en garde de son côté pas un très bon souvenir. À tel point que dans une interview accordée au site StreetPress, il n'hésite pas à balancer sur ses anciens complices...
Les fans de H seront probablement surpris de le lire mais Jean-Luc Bideau ne porte pas vraiment la sitcom culte dans son coeur. Et quand on lui en parle encore, des années après son lancement – à la fin des années 90, en plein essor de la génération Jamel, Eric et Ramzy ou Omar et Fred sur la chaîne cryptée –, le sociétaire de la Comédie-Française semble étonné mais surtout irrité, déplorant d'abord ne rien avoir appris sur le monde hospitalier. "Et cette série reste ! Je ne peux pas aller dans la rue ou être dans la file d'attente sans qu'il y ait des jeunes qui me disent : 'Mais c'est vous, professeur Strauss ?!' ou des trucs du genre : 'Est-ce que je peux me faire opérer par vous ?'", raconte-t-il, visiblement bougon, comme l'était souvent... le professeur Strauss, justement.
Mais ce qui chagrinait le plus Jean-Luc Bideau, c'était l'ambiance sur les tournages. Notamment à cause de Jamel Debbouze et Eric et Ramzy. "Vous savez ils étaient très durs, les trois infirmiers. Ils venaient de la banlieue et tout. (...) Ce qui m'a le plus tué, c'est : 'T'es une caillera, j'vais te fonceder' (...) Pendant une semaine, ils me disaient ça. Je ne comprenais pas et ils étaient morts de rire !", se lamente encore l'ex-professeur, pourtant tout aussi barré dans la série de Canal+ que ses petits camarades, avec lesquels on l'aurait imaginé très complice.
Et outre ce décalage compréhensible entre un comédien expérimenté - il débute en 1965 dans le film Les Bons Vivants - et ces trublions de banlieue, ce que pointe du doigt Jean-Luc Bideau, ce sont leurs caprices. "Je me demandais comment faisaient les réalisateurs pour les supporter. Les mecs étaient impossibles. Ils arrivaient le lundi et jetaient leurs feuilles en l'air : 'Merdique, merdique, merdique, merdique.' On voyait les mecs qui avaient passé la nuit à écrire les scénarios qui blêmissaient. (...) On a eu énormément de réalisateurs. Ils se cassaient car ils n'en pouvaient plus. Et les invités aussi ! Ils ne comprenaient rien !", raconte l'acteur. Ce qui ne l'a pourtant pas empêché de retrouver Ramzy Bedia dans Il reste du jambon ? d'Anne Depetrini et dans Platane, la série d'Eric Judor... sur Canal+. Mais là encore, il s'en rappelle comme d'une mauvaise expérience. "C'était une catastrophe. C'était sur une journée. On devait tourner à 10h du matin et Ramzy est arrivé à 17h. Si bien que moi, à 18h j'ai dit 'ciao, je dois prendre un avion.' Juste le temps de jouer une scène", confie-t-il.
À l'époque, Jean-Luc Bideau assure trouver le tournage tellement "insupportable" et "chiant" qu'il demande à réduire son nombre d'épisodes. Il se souvient également que Jamel avait "pris sa soeur pour être habilleuse", mais qu'elle était "incapable de coudre", et un de ses frères, Momo, en tant que producteur, qui ne faisait "que des conneries" ! L'heureux mari de Mélissa Theuriau appréciera... Encore aujourd'hui, il ne comprend pas le succès de la série et de ses anciens camarades. "Personne ne s'attendait à un succès pareil. Il était inconnu, Jamel ! D'ailleurs depuis, les trois ne font plus de tabac. Jamel fait encore un peu de films mais ce sont des trucs qui sont tellement chers..., tacle le comédien. La 'H mania' est un phénomène incompréhensible. Comme pour les Ch'tis. Et Intouchables ! Ce mec, Sy... nul avec ses téléphones à Canal ! Nul ! J'ai un copain réalisateur qui l'a eu en casting... il a fait une impro et il s'est fait jeter ! Et là, tout d'un coup il est magnifique. Et maintenant, il est habillé en X-Men aux États-Unis !", ose-t-il même.
Dans son entourage, Jean-Luc Bideau n'était d'ailleurs pas le seul à ne pas aimer H. "Ma femme n'aimait pas du tout, raconte-t-il. Ça l'irrite que ce soit un sujet d'interview ou que dans la rue les gens m'arrêtent en m'appelant Strauss." Malheureusement pour lui, c'est ainsi qu'une génération entière se souviendra toujours de lui...