De lui, beaucoup ne retiennent que son fameux "c'est de la merde", pourtant prononcé une seule et unique fois. C'est pour casser l'image "du gugusse" et révéler "l'homme" qui se cache derrière que Jean-Pierre Coffe, 77 ans, a écrit Une vie de Coffe. Beaucoup de révélations, d'anecdotes, de drames et de confessions dans ces mémoires, pour une plongée dans l'intime d'un amoureux de la cuisine.
Avortement et bébé décédé
C'est dans sa maison du lieu-dit La Forêt, au milieu de la Beauce, que Jean-Pierre Coffe reçoit L'Express pour parler de cet ouvrage publié aux éditions Stock qu'il aura mis deux ans à coucher sur papier. "Je ne sais pas si j'ai bien fait de l'écrire...", confie-t-il d'emblée à propos de ce 46e livre, très loin de ses habituels ouvrages culinaires. Tout au long des 390 pages, l'homme de convictions n'élude rien de ses drames, de ses peines, de ses joies, évoque les bons comme les mauvais souvenirs. Une plongée dans l'intimité méconnue d'un épicurien, où il évoque notamment la découverte, dans le bidet de la salle de bain, du corps sans vie de son petit garçon : sa première femme venait d'avorter en cachette... Ou encore cet accident de voiture suite à une soirée un peu trop arrosée chez Paul Bocuse qui coûta la vie aux deux personnes de la voiture d'en face...
Loin de ses vestes colorées et de ses lunettes à grosse monture renvoyant l'image d'un bonhomme jovial, la vie de Jean-Pierre Coffe tient parfois du roman social époque Victor Hugo, où le drame se vit au quotidien. On partage sa peine en découvrant l'émouvant récit de la mort de sa fille Dominique, décédée à 37 ans des suites d'un cancer, avec qui il venait tout juste de reprendre contact après vingt ans de silence, ou lorsqu'il parle de la faillite de ses deux restaurants. Son AVC, suivi d'une longue rééducation et d'envies de suicide, est également abordé sans ambages.
Expérience homo
"A 77 ans, je suis en phase terminale, je n'ai plus rien à cacher. Derrière le gugusse, il y a un homme", explique Jean-Pierre Coffe à L'Express, qui publie en exclusivité les bonnes feuilles d'Une vie de Coffe sur son site internet. Et effectivement, Jean-Pierre Coffe ne cache rien. Sa première fois avec un homme ? Il la raconte avec moult détails très crus : une expérience "étrange", durant laquelle il prendra un plaisir certain. "Même si je ressentais un manque, écrit-il dans son livre. Manque de quoi, au fait ? D'une femme !" Le lecteur découvrira également ses escapades dans "les boîtes à garçons", ses relations sexuelles avec les femmes...
Représentant d'une marque de papier à cigarettes, directeur de publicité aux Éditions Robert Laffont, publicitaire, restaurateur, meneur de revues, il finira par trouver sa voix à la télé et la radio. Mais Jean-Pierre Coffe l'assure, il n'a pas fait carrière : "C'est la vie qui a toujours choisi pour moi. Si mon père n'avait pas été tué à la guerre quand j'avais 2 ans, j'aurais été coiffeur à Lunéville. J'ai eu de la chance, d'une certaine façon..."
"Ca, c'est de la merde !"
C'est Jean Carmet, "le collègue de goulot" et ami de toujours, qui le convainc d'embarquer pour l'aventure Canal+ aux débuts de la chaîne en 1984, suite à une proposition de Michel Denisot. Cette aventure fera de lui une icône médiatique, pourfendeur de la malbouffe : un jour de 1992, dans l'émission La Grande Famille, il balance une saucisse "loin d'être fabriquée selon le code des usages de la charcuterie (...) amalgame de saindoux et de mauvaise tripaille", en s'écriant "ça, c'est de la merde !". Sa seule et unique fois. Pourtant, encore aujourd'hui, "des jeunes gens me saluent dans la rue par ce gimmick qui fait toujours la joie des réseaux sociaux", assure-t-il dans son ouvrage...
Coffe passe à table, un entretien avec Jean-Pierre Coffe à retrouver dans les pages de L'Express du 29 avril 2015.
Une vie de Coffe, de Jean-Pierre Coffe, aux éditions du Stock, le 6 mai en librairie