Mise à part sur les tatamis, ce qui lui a d'ailleurs valu quelques remontrances officielles, Teddy Riner est un garçon charmant, plutôt calme et discret...
Tout le contraire de ce que l'on a pu voir du côté de Londres à l'issue de la finale de ce vendredi 3 août remportée d'une main de maître face au Russe Alexandre Mikkhaïline. Teddy Riner exulte, tombe à genoux, salue son adversaire, puis l'enlace, avant de se précipiter pour baiser les pieds de son entraîneur, chaussé de souliers d'or. "J'ai envie de remercier ma famille, mes amis, le staff... la nation entière, car j'ai eu l'impression qu'elle était derrière moi. Cela m'a transcendé. Comme le public. Avec tous ces supporters, ces drapeaux français, je ne me suis pas senti à Londres, mais plutôt à Paris" confiait le colosse aux cinq titres mondiaux auxquels il faut désormais ajouter un titre mondial. A 23 ans seulement.
Alors oui, Teddy Riner a filé vers la tribune où s'étaient massés des centaines de supporters. Parmi eux, sa maman, bien évidemment, son papa qu'il a fallu aller chercher : "Je suis carrément monté dans les tribunes pour le voir. Papa, toujours égal à lui-même... Il était très fier, en tout cas, je l'ai lu dans son regard." Et puis il y a "[s]a chérie", Luthna.
La jeune fille l'attendait patiemment au bas de la tribune, avant de le prendre dans ses bras, à moins que ce ne soit l'inverse, et lui offrir un long et tendre baiser pour le féliciter. De longues minutes à savourer ce titre, au milieu des fans, des enfants, des adultes ou des athlètes français présents. Au point de se voir tirer par la manche pour les officiels pour répondre aux obligations, et rejoindre le bus pour le ramener au village olympique. Mais Teddy Riner n'en avait cure, et préférait profiter de ces instants magiques avec toutes les personnes présentes, famille, amis et anonymes confondus. "La vie est belle, confiait-il des trémolos dans la voix. Et courte. Il faut en profiter, la croquer. Je suis quelqu'un de positif. Ma joie de vivre, on ne pourra pas me l'enlever. J'adore rire, faire ou dire des conneries avec les copains."
Ceux qui rigolaient moins hier soir, c'étaient ses adversaires, incapables de prendre le dessus ou même de mettre le colosse de 132 kilos en difficulté. "C'était trop dur, il était trop fort pour moi. Il bouge trop vite, j'étais sûr avant le combat de ne pas pouvoir gagner" confiait dépité le pauvre Janusz Wojnarowicz, pourtant onzième mondiale. "Je n'ai rien pu faire, c'était dur physiquement. Je suis déçu, j'ai tenu plus de quatre minutes, c'est dommage" reconnaissait le Tunisien Faicel Jaballah. Même son de cloche chez Kim Sung-Mim : "Il est tellement plus grand et plus costaud que moi. Je n'arrivais pas à entrer dans le combat, je suis resté passif."
Quant au défait de la finale, Alexander Mikhaïline, triple champion du monde au mitan des années 2000, le moment était dur. D'autant plus que la défaite se joue sur les pénalités distribuées par les arbitres pour refus de combattre. "J'attends ce moment depuis douze ans, ce n'était pas pour une médaille d'argent" expliquait-il amère. Et malgré des critiques acerbes envers les juges, il reconnaissait la supériorité de son jeune adversaire : "Il a été très rapide, il a bien combattu mais... De toutes les façons, vous avez vu, il a une médaille d'or autour du cou et la mienne est d'argent. Disons que je m'attendais à un autre combat."
Les adversaires de Teddy Riner auraient-ils peur, au point de ne pas vouloir l'affronter ? "Dans ce cas-là, qu'ils bossent pour être plus costauds, plus durs, répond le médaillé. Moi, j'ai travaillé pour en arriver là. Mike Tyson a effrayé tous les boxeurs avant qu'un mec y croit et le batte. Si c'est pour baisser les bras d'emblée, ce n'est pas la peine. Qu'ils prennent leurs couilles !"
Son avenir immédiat, c'est loin du judo qu'il le voit : "Me reposer, profiter, me faire dorer au soleil des Antilles. Je vais couper de trois à six mois. Du bonheur plein le coeur."