Vendredi 26 juillet 2024 démarrent les Jeux Olympiques à Paris, une manifestation de grande ampleur et coûteuse que les organisateurs souhaitent la plus grandiose - notamment pour l'ouverture - et réussie possible. Toutefois, la fête est entachée par une affaire qui vient d'être révélée ce mardi 6 février : le président du comité d'organisation des Jeux de Paris-2024, Tony Estanguet , est visé par une enquête confiée à la police judiciaire parisienne, sur les conditions de sa rémunération. Il s'est exprimé le soir même et nie toute responsabilité.
Présent à l'inauguration de la piscine Annette Kellerman à La Courneuve, près de Paris, le triple champion olympique de canoë (2000, 2004, 2012) Tony Estanguet a déclaré : "Je ne décide de pas de ma rémunération ni de son cadre." Il a ajouté : "Je fais confiance à ce qui a été décidé à l'époque [en 2018]. (...) Le système qui a été décidé, c'était que je ne pouvais pas être salarié et qu'il fallait créer une structure ad hoc qui facture chaque mois au comité d'organisation".
Tony Estanguet, père de trois enfants, a perçu une rémunération annuelle de 270 000 euros bruts jusqu'en 2020, selon des chiffres communiqués par le Comité d'organisation des Jeux Olympiques (Cojo) dès 2018, année à laquelle il a pris ses fonctions. Cette rémunération était ensuite susceptible d'évoluer dans une limite de 20%, en fonction de certains critères de performance, avait précisé l'instance à l'époque. Mais "le montant de la rémunération n'a pas bougé depuis", a assuré le directeur général délégué du Cojo Mickaël Aloiso.
Sollicité mardi par l'AFP, le Cojo, faisant part de son "étonnement" à l'annonce de l'ouverture de l'enquête, a argué que "le cadre de la rémunération du président du comité d'organisation" était "très strictement encadré".
Il a en outre rappelé que son patron n'était pas salarié du Cojo, une association de type loi 1901 financée à 96% par des fonds privés et qui bénéficie d'une dérogation, le caractère lucratif lui ayant été "confirmé par un rescrit fiscal". Ce statut implique que ses dirigeants ne sont "pas soumis" à un plafond de rémunérations, a-t-il ajouté. Tony Estanguet, via une société qu'il a créée, perçoit donc sa rémunération sous forme de bénéfices non commerciaux.
Le Cojo a aussi fait valoir que la rémunération de l'ancien sportif "a été décidée et validée par le premier conseil d'administration du comité d'organisation le 2 mars 2018, qui a statué en son absence, de façon souveraine et indépendante".
Début 2021, deux rapports de l'Agence française anticorruption (AFA) sur l'organisation des JO (26 juillet-11 août) notaient des "risques d'atteintes à la probité" et de "conflits d'intérêts". Dans l'un de ces rapports, l'AFA évoquait le cas de l'entreprise de Tony Estanguet, pointant un "montage atypique dans le cadre d'une association de loi 1901".
L'organisation des Jeux olympiques et paralympiques (28 août-8 septembre) de Paris fait déjà l'objet de trois autres enquêtes financières distinctes, notamment pour des soupçons de favoritisme et de détournements de fonds publics lors de l'attribution des marchés.
La question des rémunérations des principaux dirigeants du comité d'organisation était devenue sensible dès l'attribution des Jeux à Paris par le CIO en septembre 2017. Le Canard Enchaîné avait évoqué à cette époque un salaire de 450 000 euros annuels pour Tony Estanguet, immédiatement démenti par l'intéressé.