L'été dernier, Marion Bartoli inquiétait tout son petit monde avec son extrême maigreur, couplée à un discours inquiétant. Guérie de sa dépression, après plusieurs mois d'exil à Dubaï, la sportive de 32 ans a accepté de briser le silence sur sa longue et mystérieuse descente aux enfers lors d'un entretien pour le magazine Vanity Fair.
La journaliste Marie-France Etchegoin détaille le parcours atypique et presque glaçant de la jeune femme, qui possède le QI d'Einstein et aurait pu tout réussir dans la vie, si son père médecin n'avait pas décidé d'en faire une championne de tennis. Walter Bartoli l'entraînera toute sa carrière avec un acharnement qui pousse au vice, et dans des conditions parfois limites, pour faire de son corps une machine capable de décrocher le Saint Graal.
À titre d'exemple, la petite était forcée de reproduire le même exercice dix fois de suite et sans faute, jusqu'à ce qu'elle y arrive... voire jusqu'à épuisement. L'homme avait aussi pris l'habitude de la faire s'entraîner, attachée à un élastique. "On arrêtait vers 20h", assure-t-il tandis que sa fille le reprend "Non papa, on arrêtait vers 23h et parfois bien plus tard". Plus tard, elle ne s'arrêtait de taper dans la balle qu'une fois les pieds en sang.
En 1999, le piège se referme. Celui que l'on appelait alors "professeur Nimbus" ou "docteur Maboul" quitte son travail pour mettre au point et se consacrer à ce qu'il appelle encore "Le Projet". Dans la foulée, père et fille quittent Sophie, la mère de famille, pour partir s'entraîner en Suisse, où la petite "vivait en autarcie, sans aucun autre lien social que celui qu'elle avait avec Walter". Un lien qu'elle ne coupera jamais, quitte à se priver des Jeux olympiques et autres compétitions qui interdisent les coachs privés. Marion ne veut s'entraîner qu'avec lui.
Pourtant, malgré les critiques qu'il rabâche et les sévices qu'il lui inflige, en 2013, c'est la consécration : elle remporte enfin le tournoi de Wimbledon. Mais à la joie de la victoire succède l'anéantissement. Marion prend sa retraite, se détache de son père et tente une reconversion dans le monde de la mode. "Elle s'enivre de travail et de projets" et se lance un nouveau défi : perdre du poids.
En quelques mois, la jolie brune n'a plus que la peau sur les os. Son état de santé est tel qu'elle finit l'été hospitalisée au Palace Merano puis à l'hôpital de Garches, pour venir à bout d'un soi-disant virus qui l'empêche de s'alimenter correctement. Alors qu'on la pensait au fond du gouffre, quelques mois plus tard, le phoenix renaît de ses cendres et Marion participe au marathon de New York, grâce à son père qui lui a signé le certificat médical exigé par les organisateurs, et ce malgré son état de santé.
Walter est de retour et n'est pas prêt à lâcher sa place. C'est d'ailleurs tous les deux qu'ils sont partis vivre à Dubaï, "dans un grand appartement génial", d'où ils gèrent la société de Marion, ses contrats de mode et son droit à l'image. "Je suis son assistant et c'est elle le chef", assure-t-il. Jusqu'à quand ?
Coline Chavaroche