Curieusement, Metronomy n'en a pas tout à fait fini avec les Nights out (titre et concept de son album précédent, paru en 2008), les nuits de sortie, de fête, d'euphorie, de lassitude, d'hallucinations et de "solitude extrême qui nous envahit lorsqu'on est entouré de fêtards complètement déchirés et désespérés" - voire d'emmerdement.
Curieusement, le groupe du Devon annonce son troisième album, The English Riviera (sortie avril 2011), en nous proposant des images d'une de ces fameuses sorties nocturnes qui lui avaient probablement inspiré Nights out, "bande son d'une soirée inspirée du fait de se retrouver souvent dans des soirées emmerdantes". Le clip de She Wants nous entraîne en effet, dans le vertige des sens, le délire perceptif, l'étourdissement du slow motion, à travers une soirée aux allures fantasmatiques et à l'esthétisme glacialement sensuel qui placent le moment dans une atmosphère du type Eyes Wide Shut. Un travail à mettre au crédit de Jules et Mat pour SoLab (dernièrement Raphael Saadiq, les PPRR ou Wax Tailor).
Curieusement, Joseph Mount, le maître à penser des sons du désormais quatuor anglais, accepte de se parjurer, puisque She Wants, de toute évidence, se démarque de ses prédécesseurs par sa science métronomique de l'épure. Au moment de Nights out, effervescence volontiers tachycardique, Mount définissait Metronomy en ces termes : "Metronomy est un groupe pop, en ce sens qu'une pop-song doit apporter quelque chose de nouveau à l'auditeur toutes les cinq ou dix secondes, pour qu'il puisse réévaluer sans cesse son expérience et l'ensemble du morceau. Il doit être bombardée d'idées, autant musicales que visuelles. C'est une sorte de mind-game - même si nous ne voulons pas paraître plus intelligents que l'auditeur..."
Avec She wants, le parjure est délicieux. La composition est peut-être moins acrobatique, moins nébuleuse, moins révolutionnaire, peut-être moins incitative à la dissection au premier abord (et pourtant !). Mais certainement pas moins magnétique ni moins vertigineuse. Le niveau de raffinement de cette litanie maîtrisée, moderne et désabusée, est assez impressionnant : la variété extrêmement discrète, sonore et rythmique des percussions, la ligne de basses ténébreuse sans être nerveuse, l'habillage tintinabulant des pistes de guitare, les touches et nappes de synthé tantôt élégiaques, tantôt weird... Et la voix toujours superbement domptée de Joseph Mount, pour une compo à boucle qui ne s'use pas à s'écouter en boucle.Il semblerait que She Wants honore avec la dernière élégance les fondamentaux "étymologiques" de Metronomy, astre électro qui dilate le temps et fait graviter la loi (nomos, en grec) de la mesure, de la cadence (metro) dans l'univers d'une musique formidablement pulsatile.
Metronomy sera de retour en France en février à Tours et en mars à Nice, puis au printemps, le 4 mai à Paris, puis du 21 au 26 à Toulouse, Bordeaux, Rennes, Lyon, Tourcoing et Strasbourg.Guillaume Joffroy