Elle était jeune, belle, destinée à devenir une actrice incroyable et à tout chambouler sur son passage : à 25 ans, Pauline Lafont semblait avoir la vie devant elle. Fille de l'actrice de la Nouvelle Vague Bernadette Lafont, elle en avait hérité son visage mutin, ses yeux bleus et ses joues rondes, mais surtout son talent et sa gouaille, qui présageaient d'un futur radieux.
Mais la vie en aura décidé autrement : en ce chaud début de journée d'août 1988, la jeune femme est en vacances dans la maison familiale des Cévennes avec son frère. Elle prend le petit-déjeuner avec eux et le jardinier, qui est aussi un ami, avant de leur annoncer qu'elle part se promener dans la garrigue derrière la maison. La garrigue, c'est leur terrain de jeu depuis l'enfance : loin des plateaux de cinéma parisien où évolue leur mère, Pauline et David ont grandi là, dans les Cévennes et connaissent la nature par coeur.
Habillée d'une robe légère selon son frère, elle ne prend aucun papier d'identité sur elle... mais ne reviendra jamais : en ne la voyant pas rentrer le midi, David s'inquiète, il va faire un tour en moto, essaie de la retrouver mais sans succès. Il prévient sa mère, qui à son tour s'inquiète et appelle les gendarmes le soir même. 20 gendarmes, 40 pompiers, un hélico et des dizaines de bénévoles sont appelés sur place mais en vain, les recherches qui dureront plusieurs mois, avec des hauts et des bas ne donneront rien. Pourtant, David insiste et contacte même le président de la république... sans succès.
Pour les gendarmes, c'est un enlèvement, les habitants du village pensent à un accident. Mais lorsque les médias sont mis au courant, c'est l'avalanche des propositions : certains pensent à une secte, la disent en cure, en fugue, sur le point de se suicider... Bref, les hypothèses s'enchaînent et déferlent sur la famille sans jamais rien donner. Il faut dire que la famille Lafont est connue et que tout le monde ne se préoccupe que de ça, torturant parfois l'actrice qui selon l'opinion publique, ne montre pas assez de tristesse.
"J'ai été torturée. On m'a harcelée. Quelqu'un m'a même demandé un jour de jurer que je ne savais pas où était Pauline... Je n'ai de comptes à rendre à personne sur ma peine, ni sur la façon que j'ai de la ressentir et de l'exprimer", racontait-elle un an plus tard dans Paris Match.
La folie médiatique se calme à la fin de l'été, et en novembre, trois mois après la disparition de la jeune femme, le fin mot de l'histoire, tragique, est dévoilé : un berger tombe sur un squelette qui s'avèrera être celui de Pauline, selon un jogging, retrouvé sur elle, une bague et ses dents. Les hypothèses étaient bien toutes fausses : Pauline est morte sur le coup, depuis le début, en raison de sa chute. Et pour sa mère, le deuil a pu commencer. "Pauline est tout le temps avec moi", disait-elle. Il y a neuf ans, elle l'a enfin rejointe.