De l'été en pente douce à l'été meurtier...
Tout commence le 11 août 1988. Pauline Lafont part en balade, quittant la demeure familiale à Saint-André-de-Valborgne dans le Gard, sans préciser de destination. La fille de Bernadette Lafont et du sculpteur hongrois Diourka Medveczky, et soeur d'Elisabeth et David, ne sera retrouvée que trois mois après ; à l'état de squelette, sa bague permettra de l'identifier. Une découverte macabre qui mettra fin aux questions et aux rumeurs les plus violentes. On colportait en effet des histoires de retraite en communauté, de couvent voire de fugue en Chine.
Bernadette Lafont ne croyait pas à ces ragots. Elle avait déclaré à l'époque à l'AFP : "C'est l'angoisse totale. Peu avant que je me lève, Pauline est partie se balader dans les Cévennes, comme ça, sans rien emporter. [...] Elle a dit, 'je vais me balader', et voilà. [...] La dernière fois que je l'ai vue, c'était la veille de son départ. Elle est venue m'embrasser dans ma chambre avec un merveilleux sourire en me disant : Bonsoir maman." De quoi tordre le cou aux "ragots dégoûtants" à propos d'une dispute familiale.
De gros moyens seront mis en oeuvre pour tenter de retrouver Pauline Lafont : 300 hommes, des chiens, des radiesthésistes avec leur pendule, un hélicoptère avec caméra infra-rouge balayant la région, tous ont exploré en vain la guarrigue. Les gendarmes penchent pour l'hypothèse d'une fugue et entendent une centaine de personnes après une plainte contre X déposée par le frère de Pauline pour "arrestation arbitraire et séquestration". Bernadette Lafont et ses proches ont espéré jusqu'à ce que la découverte de son corps le 21 novembre mette fin à la terrible attente.
Une attente gangrenée par des déclarations fausses. Des témoignages dressaient à l'époque le portrait d'une jeune femme angoissée à un tournant de sa carrière, minée par une récente rupture amoureuse et une cure d'amaigrissement peu concluante. Au journal de 20 heures de la cinquième chaîne, Guillaume Durand "dit avoir des assurances selon lesquelles Pauline Lafont est vivante". En 1997, le présentateur avait surpris tout le monde dans Nulle Part Ailleurs, en présentant à Bernadette Lafont des excuses au sujet de sa fille, Pauline, dont le corps n'avait été retrouvé que trois mois après son décès en août 1988, rappelle Libération. "J'ai fait ça parce que ça me paraît décent pour les gens qui ont des souvenirs", explique l'ancien de La Cinq. "Un jour où je présentais le journal, quelqu'un est arrivé, persuadé d'avoir des infos intéressantes sur Pauline Lafont. On s'est plantés. J'ai détesté cette affaire-là. Et je n'accepte pas la télé qui ne s'excuse pas." Il s'était déjà excusé publiquement en recevant le 7 d'Or du meilleur présentateur de JT, en 1989.
"On ne se remet jamais d'une telle tragédie"
La jeune vie de Pauline Lafont a pris fin. Après avoir joué une petite fille en 1976 dans Vincent mit l'âne dans un pré (et s'en vint dans l'autre), elle apparaît dans les années 1980 dans Papy fait de la résistance, L'Amour braque, Poulet au vinaigre, ou encore Le Pactole dans lequel joue sa mère. Le cinéma se souviendra d'elle pour son interprétation à fleur de peau dans L'Eté en pente douce (1987) réalisé par Gérard Krawczyk avec Jacques Villeret et Jean-Pierre Bacri. Elle y jouait le rôle de Lilas, qui accompagne Fane qui va retrouver son frère handicapé mental, Mo, dans la maison de sa mère. Mais Voke, le garagiste voisin, a des vues sur la maison et sur Lilas. Une performance lui valant de belles critiques, mais sa mortelle randonnée écourtera les promesses d'une belle carrière. Beauté sauvage du cinéma français, elle avait également posé dans le magazine masculin de charme Lui.