Il y a des noms qui ont permis que les conditions de la femme avancent en France, celui de Gisèle Halimi fait partie de ceux-là. La célèbre avocate est morte mardi 28 juillet 2020, une triste nouvelle annoncée par sa famille à l'AFP. "Elle s'est éteinte dans la sérénité, à Paris", a déclaré l'un de ses trois fils, Emmanuel Faux, estimant que sa mère avait eu "une belle vie". Gisèle Halimi s'en est allée au lendemain de son 93e anniversaire. "Sa famille est autour d'elle, a ajouté son fils. Elle a lutté pour arriver à ses 93 ans."
Quelques minutes seulement après l'annonce de sa mort, Nicolas Bedos s'est emparé de sa page Instagram pour rendre hommage à cette femme qui occupait une place très importante dans sa vie. Gisèle Halimi était sa marraine, il l'adorait. L'acteur et réalisateur de 41 ans n'a pas seulement salué son incroyable carrière, il a aussi regretté que 2020 soit une année aussi douloureuse pour lui. La mort de sa marraine intervient peu de temps après celle de son père. Guy Bedos s'est éteint le 28 mai dernier à l'âge de 85 ans. L'humoriste repose en Corse, dans le village de Lumio.
"Ma marraine adorée, quelle vie que la tienne ! Les femmes te doivent tant ! La société te doit beaucoup et moi je te dois trop. Nos mercredis m'ont tout appris, j'ai eu tellement de chance. Cette année vient du diable, je la hais comme je t'aime. On va te relire avec respect. Le paradis affiche complet", a écrit Nicolas Bedos, empreint de tristesse, mais aussi de nostalgie en repensant à tous les moments passés avec cette femme qui a beaucoup compté pour lui.
Issue d'une famille modeste, Gisèle Halimi est née le 27 juillet 1927 à La Goulette en Tunisie. Avocate engagée, elle se fait notamment connaître lors du procès emblématique de Bobigny, en 1972, où elle défend une mineure jugée pour avoir avorté à la suite d'un viol. Elle obtient la relaxe de la jeune fille et parvient à mobiliser l'opinion, ouvrant la voie à la dépénalisation de l'avortement, début 1975, avec la loi Veil.
Fondatrice en 1971 avec Jean-Paul Sartre et Simone de Beauvoir de l'association pour le droit à l'avortement Choisir la cause des femmes, elle est la même année l'une des signataires du célèbre manifeste des 343 femmes disant publiquement avoir avorté.
Élue députée de l'Isère (apparentée PS) en 1981, Gisèle Halimi poursuit son combat à l'Assemblée, cette fois-ci pour le remboursement de l'interruption volontaire de grossesse (IVG), finalement voté en 1982. Avant de prendre ses distances avec le Parti socialiste après son élection à l'Assemblée. En 1998, elle fait partie de l'équipe qui crée l'Association pour la taxation des transactions financières et pour l'action citoyenne (Attac).
Parallèlement à sa carrière d'avocate, elle a mené une carrière d'écrivain. Parmi sa quinzaine de titres figurent Djamila Boupacha (1962), du nom d'une militante emblématique du FLN, et une oeuvre plus intimiste comme Fritna (1999), sur sa mère peu aimante, "juive pratiquante totalement ignorante".
Mère de trois garçons, dont Serge Halimi, directeur de la rédaction du Monde diplomatique, elle a confié qu'elle aurait aimé avoir une fille pour "mettre à l'épreuve" son engagement féministe. "J'aurais voulu savoir si, en l'élevant, j'allais me conformer exactement à ce que j'avais revendiqué, à la fois pour moi et pour toutes les femmes", a-t-elle dit au Monde en 2011.
Dans une longue interview accordée au Monde en septembre 2019, la nonagénaire s'étonnait encore que "les injustices faites aux femmes ne suscitent pas une révolte générale".