De profil, les cheveux mi-longs pris dans le vent du littoral, la posture de celui qui n'est jamais rassasié de voyage et de scrutation du monde... on aurait presque pu le confondre avec un certain Stanislas, qui a récemment rendu à la terre ferme ses Carnets de la vigie. Mais c'est bien Nilda Fernandez qui surgit souplement, après un Noël en famille à Lyon et un Nouvel An entre amis à Londres, avec un nouvel album éponyme qui succède de... dix ans au précédent, Mes Hommages.
C'est donc après une décennie quasi vierge, qui n'aura vu, en dehors de la parution de son second ouvrage (Les chants du monde), que des best of en éditions diverses, que l'androgyne chanteur hispanique fait son retour dès les premières lueurs de la décennie qui s'ouvre.
Eponyme comme celui qui le révéla et fit son succès en 1991 (Grand Prix de l'Académie Charles-Cros, Espoir des Victoires de la Musique 1992), Nilda Fernandez sera disponible le 8 janvier (Dièse/Harmonia Mundi), et défendu sur scène les 26 janvier (au Café de la Danse) et 12 avril (à La Cigale), annoncé par Plages de l'Atlantique, dont nous vous proposons le clip ci-dessus, réalisé à partir d'images de scène qui vous permettront de découvrir ou redécouvrir la fougue catalano-andalouse de l'artiste.
Pudique et mutin lorsqu'il pastiche ostentatoirement les grands lieux de la poésie et du conte merveilleux pour se poser en artiste gavrochard dans Derrière ma fenêtre ("Je suis pas tellement génial ce mardi matin/Je regrette de ne pas être poète ni musicien/Je sais juste avec une guitare entre les mains/Faire un peu la frime aux rimes et aux refrains"), ce Nilda Fernandez-là, dix ans après l'hommage (Mes Hommages) aux "anciens" (Dutronc, Ferré, Birkin, Barbara, Polnareff...), ne répond à aucune attente, mais obéit à une nécessité : "le devoir de renaître, de s'engendrer soi-même", "je suis artiste depuis la vie et pour la vie", professe-t-il, ce qui le conduit à mêler l'orchestre de cordes et la guitare flamenca, le ska et l'appel de la Méditerranée, le rock et les échos lointains de l'Est, des réminiscences de gospel et l'accordéon parigot.
Quant aux dix années qui ont précédé cet album enregistré à Gênes : un maelström d'aventures et de création. Il a vécu et chanté plusieurs années en Russie ("j'ai croisé une fille russe que j'avais connue plusieurs années auparavant. Elle m'a dit qu'il fallait que je vienne à Moscou. Je suis parti là-bas et deux jours après mon arrivée j'ai rencontré le chanteur russe Boris Moïsseïev qui m'a proposé de faire de moi une star dans son pays", explique-t-il), il a monté un spectacle avec des artistes de cirque à Cuba, mis en scène Carmen avec des artistes de flamenco, bâti un spectacle avec des amateurs sur la mémoire de la ville d'Ivry, chanté ici ou là avec Adamo, Dorval, Mouss et Hakim, Georges Moustaki, Lara Fabian ou la soprano Sylvie Brunet...
Au printemps 2008, Nilda profite d'un concert en Suisse pour rendre visite, quelques centaines de kilomètres plus au sud, à Alan Simon qui mixe un album à la Casa Della Musica, sur le port de Gênes. A l'automne, il y revient poser son sac et ses chansons. Quatre mois avec des musiciens italiens, dont la fameuse Squadra, choeur emblématique de l'art prolétaire du "trallalero". Puis il repart à Paris enregistrer sa voix (et les accordéons de Marcel Azzola ou Lionel Suarez) dans le légendaire studio créé par Bernard Estardy. "C'est difficile d'enregistrer ma voix quand on ne comprend pas mes textes. J'habite non loin de CBE où se trouve encore tout le matériel des années 70. J'ai donc chanté dans le même micro que Joe Dassin, Cloclo, Nino Ferrer et Gérard Manset."
A 52 ans, l'interprète mémorable de Nos fiançailles et Marie-Madeleine, s'il n'est plus en roulotte, vous convie sur ses traces dans un making of que nous vous offrons également ci-dessus, etqui vous permettra de vérifier ce mot de son cru qui sonne comme une maxime : "Je ne finirai jamais de justifier mes hasards".
Découvrez l'album sur : www.nildafernandez.com.