Oscar Pistorius a affronté le premier jour de son procès en silence. Accusé d'avoir assassiné sa compagne Reeva Steenkamp, le Sud-Africain a plaidé non coupable et soutenu sa thèse de l'accident. Pour cette première audience, il a dû affronter le témoignage d'une voisine, que la défense n'aura jamais réussi à déstabiliser.
"Des cris à glacer le sang"
Premier témoin d'un procès qui devrait durer trois semaines au terme duquel Oscar Pistorius pourrait être condamné à 25 années de prison incompressibles : Michelle Burger, jeune universitaire d'une vingtaine d'années et habitante du lotissement voisin de celui de l'accusé. Elle raconte comment la nuit du 14 février 2013, elle a été réveillée par des cris et des coups de feu. "Juste après 3h du matin, j'ai été réveillée par de terribles cris de femme. (...) Elle appelait au secours. J'ai entendu de nouveau des cris. C'était pire qu'avant. Elle était effrayée. (...) J'ai su que quelque chose de terrible allait arriver", raconte-t-elle au juge, évoquant des "cris à glacer le sang", ainsi que quatre coups de feu et des hurlements qui se sont atténués jusqu'à s'arrêter après le dernier tir.
Après une première interruption d'audience, l'avocat de la défense, Barry Roux, un redoutable habitué des prétoires, s'est attaqué à ce témoignage qui semble donner un déroulé précis de la soirée. Un contre-interrogatoire jugé agressif, mais qui n'a jamais déstabilisé Michelle Burger. Cette dernière a répondu à toutes les attaques, à chaque fois en regardant la juge Thokozile Matilda Masipa droit dans les yeux.
La défense contre-attaque
Barry Roux a ainsi tenté de démontrer que ses déclarations à la police n'était pas les mêmes que celles qu'elle avait faites devant la cour. "Les événements de cette soirée ont été extrêmement traumatisants pour moi. La peur dans la voix de cette femme est difficile à décrire à la cour. (...) J'ai entendu la terreur dans la voix de cette femme", a-t-elle notamment déclaré. Si elle est certaine du nombre de coups de feu qu'elle a entendus, son mari l'est un peu moins. Barry Roux en a donc profité pour s'engouffrer dans la brèche, en lui demandant si les coups de feu ne pouvaient pas être en réalité des coups de battes de cricket émis par Oscar Pistorius lorsqu'il a tenté d'ouvrir la porte des toilettes. "J'ai bien entendu des tirs et non pas des coups de batte. Ma maison se trouve à plus de 170 mètres, je ne pouvais entendre que les coups de feu", a répondu Michelle Burger, sûre d'elle "à 100%".
Et alors qu'elle avait répondu jusque-là en afrikaans, Michelle Burger a repris à plusieurs reprises l'interprète présente au tribunal, pour la corriger dans ses traductions. Elle s'est finalement résolue à répondre en anglais et en afrikaans, laissant la pauvre traductrice quitter la salle d'audience en prétextant une quinte de toux. Un épisode qui n'est pas sans en rappeler un moins glorieux durant l'hommage rendu par Barack Obama à Nelson Mandela...
Malmené, le témoin tient bon
"La peur dans la voix de cette femme est difficile à raconter au tribunal. J'étais traumatisée", déclare Michelle Burger en s'adressant directement à la présidente du tribunal, en anglais, avant de poursuivre : "Ce n'était pas n'importe quelle nuit, c'était chargé d'émotion." Lorsque le témoin évoque les cris entendus avant, pendant et après les coups de feu, Barry Roux contre-attaque : "Votre déposition contredit ce que vous dites devant ce tribunal."
Selon lui, Michelle Burger aurait déclaré aux enquêteurs qu'elle n'aurait entendu des cris qu'après les coups de feu. "Il n'y a pas les expressions 'à vous glacer le sang', 'anxiété', que vous utilisez devant le tribunal", ajoute-t-il. La défense et le procureur s'affronte alors sur ce paragraphe de la déposition, lu en afrikaans, pour savoir ce qu'a réellement déclaré Michelle Burger.
"Je ne vais pas changer mon témoignage ! J'étais persuadé qu'il y avait une attaque dans la maison par des cambrioleurs, il n'y avait pas de doute dans mon esprit à cause de la peur dans cette voix de femme. (...) Ces cris, ces hurlements, étaient pétrifiants, avant les tirs", assène cette dernière, pas décontenancée par les attaques de la défense, allant jusqu'à ajouter : "Nous avons été choqués quand nous avons lu que M. Pistorius affirmait qu'il croyait que c'était un cambriolage. Cela ne correspondait pas à ce que nous avions entendu avec mon mari."
Un mari qui sera à son tour entendu demain par le tribunal. Une fois de plus, Oscar Pistorius écoutera, impassible, les témoignages se succéder à la barre, lui qui n'a fait le moindre signe à l'égard de sa famille ou celle de Reeva...