Quelques heures après que la nageuse italienne Federica Pellegrini a livré ses impressions après cinq semaines d'entraînement sous la houlette de Philippe Lucas, profitant de l'occasion pour mettre les choses au clair concernant ses rapports avec Laure Manaudou, son ancienne rivale et ancienne protégée de son nouveau mentor ("Avec Laure, on s'appelle. Je prends des nouvelles de sa fille."), c'est au tour du coach français de dresser un premier bilan intermédiaire de son boulot avec "Fede". Le prochain checkpoint, pour ce nouveau duo vedette de la natation, sera probablement les championnats d'Italie, mi-avril, sur la route des Mondiaux de Shanghaï.
Manaudou/Pellegrini, passé contre avenir...
Dans les colonnes du Figaro de ce 10 mars 2011, l'entraîneur le plus titré de la discipline en France nous régale encore de sa faconde toujours bien gauloise. Surtout, il se plaît à répéter une formule emblématique de sa collaboration avec l'athlète vénitienne : "Manaudou, c'est le passé."
Et de développer : "C'est difficile de comparer. Manaudou était une dossiste passée au crawl, avec une nage bien placée, mais pas vraiment un gros braquet. Fede, elle, vient du 100 m , c'est véloce, du costaud, de la puissance. Quand ça part à l'entraînement, qu'elle envoie du bois, tu te régales. J'en mettrais plus d'une à côté d'elle qui sortirait vite du bassin pour prendre un Prozac." Un trait d'esprit qui fait écho à un autre, tenu auprès de L'Equipe, où Fifi stigmatisait les nageurs en dilettante, tenté de mettre leur maillot au clou en voyant la torpille italienne ou son homologue roumaine au sein du Team Lucas, Camelia Potec.
Philippe Lucas est de nouveau dans une dynamique ambitieuse : "Ces filles-là, ça nage pour gagner", lâche-t-il, remarquant que, "à quelques exceptions près, les mecs, à 20 ans, ils jouent encore au Circuit 24"...
D'autant que l'avènement de son ancienne protégée Laure Manaudou a ouvert la brêche, comme il le dit en ses termes virils : "Manaudou a dépucelé la natation française ! Elle a donné de l'ambition a tout le monde. Pourtant, il y avait eu des champions avant, les Caron, Plewinski, Esposito ou Maracineanu. Mais Manaudou, c'était autre chose. Elle arriveait, plongeait, et boum ! Un one-woman show qui débute aux Jeux d'Athènes, jusqu'à faire d'elle la meilleure nageuse du monde en 2007. Ils ont vu une gentille fille se transformer en guerrier de compétition."
Le come-back sportif de Laure Manaudou : "des signes de la championne olympique"
A propos de ce guerrier des bassins, qui a pris sa retraite sportive pour redevenir une gentille fille et, surtout, une maman, Philippe Lucas reste circonspect quant à un éventuel come-back. Laure Manaudou a disparu de nouveau de la circulation... après avoir très officiellement fait remarquer qu'elle s'était remise à nager. Et si elle ne cherche qu'à prendre du plaisir, personne ne semble savoir (ou vouloir dire) si la championne envisage de revenir à la compétition.
"Manaudou et Thorpe, c'est plus sympa dans l'eau que dans les tribunes. Mais il faut attendre, voir s'ils n'ont pas parlé trop vite, s'ils vont vraiment le faire et s'en donner les moyens", observe Philippa Lucas.
Le Figaro nous en dit un peu plus. S'entraînant depuis cinq mois aux Etats-Unis avec l'entraîneur de son compagnon Frederick Bousquet, Brett Hawke, sur le campus d'Alabama où Bousquet a ses habitudes et où le couple vit avec sa petite Manon, Manaudou "progresse de façon satisfaisante". "Je vois des signes de la championne olympique, indique Brett Hawke. Elle décidera le moment venu si elle veut renouer avec la compétition. Elle aime être une mère avant toute chose, mais son amour de la natation est resté intact."
Si on s'attend à la voir en tribunes fin mars, à quelques jours du premier anniversaire de sa fille Manon, à Strasbourg pour soutenir Fred dans les championnats de France, Laure ne reviendra pas en bassin de sitôt : son inscription auprès des instances ne lui permet de revenir en compétition qu'à partir du 6 juillet, trois semaines avant les Mondiaux en Chine.
"C'est bien d'entraîner une grande nageuse, tu prépares de grands événements, tu te fais moins chier !"
Le présent et l'avenir de Philippe Lucas, c'est Federica Pellegrini. "Là, j'ai un beau défi avec Fede". Un autre discours que celui qu'il tient vis-à-vis d'Amaury Leveaux, un autre des pensionnaires du Team Lucas : "Momo, il est comme ça, c'est sa vie, c'est un gitan ! Dans l'eau, il a des qualités. Mais pour gagner, il faut tout mettre en oeuvre dans sa vie. Je l'aime bien, ce môme, il me fait marrer. Mais pas tout le temps. Aujourd'hui, plus personne ne croit en lui..."
"C'est bien d'entraîner une grande nageuse, s'exclame Philippe Lucas, tu prépares de grands événements, tu te fais moins chier ! Parce que quand tu as connu le top et que tu te retrouves avec des nageurs moyens, c'est un peu comme passer du Stade de France à la fanfare de Grandpuits..."
Au passage, on constate encore une fois dans cet entretien avec Le Figaro que si Philippe Lucas ne fait toujours pas de politique, de "lèche", il sait reconnaître ses amis : "Arnaud Lagardère a été le seul à me tendre la main, à me proposer de m'accueillir au Racing, comme ça, pour aider, sans même parler business, adorable. Je suis très bien ici, j'ai un contrat de prestataire, je ne dépends pas d'un maire ou de l'un de ses adjoints. Ce genre de tringles, ça va, j'ai donné."