Son assourdissant silence en disait peut-être long. Puis par l'intermédiaire d'une amie actrice, Amber Tamblyn (Django Unchained), Quentin Tarantino s'était furtivement exprimé sur les agissements de son "ami" Harvey Weinstein, lequel a produit et distribué bon nombre de ses films dont la Palme d'or Pulp Fiction. Aujourd'hui, le cinéaste brise enfin le silence et de son propre chef, reconnaissant avoir été au courant depuis de longues années des agissements du producteur, accusé de harcèlement sexuel et de viols par près de 40 actrices.
Alors que la police de Los Angeles a confirmé ce jeudi 19 avoir ouvert une enquête sur Harvey Weinstein pour une agression sexuelle qui remonterait à 2013, alors que deux enquêtes sont déjà menées sur le magnat du cinéma à New York et Londres, Tarantino s'est exprimé dans le New York Times – l'un des deux médias à avoir révélé le scandale. "J'en savais suffisamment pour réagir plus que ce que j'ai fait", a reconnu le réalisateur de 54 ans. "C'était plus que les rumeurs habituelles, les ragots. Ce n'était pas des 'on dit' Je savais qu'il avait fait plusieurs de ces choses", a admis l'auteur de Kill Bill et Inglourious Basterds.
C'est encore plus choquant lorsque pendant son interview, Quentin Tarantino révèle que sa petite-amie de l'époque, Mira Sorvino, lui fait part d'attouchements non consentis de la part d'Harvey Weinstein. "J'étais choqué et consterné. Je ne pouvais pas croire qu'il fasse ça ouvertement. Mais la chose que j'ai pensé à l'époque, c'est qu'il était particulièrement fou de Mira. [... ] Parce qu'il était fasciné par elle, il a horriblement franchi la ligne." Convaincu que s'afficher avec sa chérie changerait la donne, l'auteur de Kill Bill a "mis de côté" l'épisode. "Je suis avec elle, il le sait et il ne lui fera plus de mal, il sait que c'est ma petite amie", s'est convaincu Tarantino.
Mais ce n'était pourtant pas le seul "dérapage" dont il avait eu connaissance. Il a également avoir avoir été au courant de l'accord à l'amiable signé entre Rose McGowan, une autre des victimes, et Harvey Weinstein. "J'aurais aimé avoir agi de façon responsable devant ce que j'ai entendu. Si j'avais fait ce que j'aurais dû faire, il aurait fallu que je ne travaille pas avec lui", a-t-il déclaré.
Pétri de honte et couvert de regrets, le cinéaste "espère" que son propre silence n'affecterait pas ses films. "Ce que j'ai fait était une marginalisation de ces incidents. Tout ce que je peux dire maintenant aura l'air d'une pauvre excuse", a-t-il confié.
Il m'a attrapée par les cheveux, et m'a forcée à faire quelque chose que je ne voulais pas. Ensuite il m'a traînée dans la salle de bain et m'a violée
Des nouvelles confidences qui viennent encore plus enfoncer le mogul hollywoodien. Le producteur, qui a été licencié de sa société, la Weinstein Company, est aussi visé par une nouvelle enquête policière pour agression sexuelle, ouverte par la police de Los Angeles.
Contacté par l'AFP, le porte-parole de la LAPD n'a pas donné l'identité de la victime mais, selon plusieurs médias, il s'agirait d'une actrice et mannequin italienne. Cette dernière avait expliqué au Los Angeles Times, sans que son identité soit révélée, que les faits s'étaient déroulés dans un hôtel de Los Angeles en février 2013. Harvey Weinstein, selon elle, est arrivé "sans prévenir" à son hôtel, et est monté dans sa chambre pour la voir, alors qu'elle avait proposé de descendre à sa rencontre. "Il a forcé le passage dans ma chambre, avait-elle raconté au journal californien. Il est devenu très rapidement agressif et demandait à me voir nue. Il m'a attrapée par les cheveux, et m'a forcée à faire quelque chose que je ne voulais pas. Ensuite il m'a traînée dans la salle de bain et m'a violée."
Avant ce nouveau témoignage, cinq actrices accusaient déjà Harvey Weinstein de viol... De son côté Harvey Weinstein a affirmé, par la voix de sa porte-parole, que les relations sexuelles publiquement révélées étaient consenties.