Personne n'a pu grandir dans les années 1980 et 1990 sans croiser Whoopi Goldberg et son inimitable bagou. Découverte par Mike Nichols et Steven Spielberg, elle devient une comique incontournable en seulement quelques rôles cultes, décroche un Oscar avant de présenter la cérémonie, puis quitte les écrans de cinéma. Loin d'avoir disparu de la scène publique, Whoopi Goldberg s'est reconvertie.
Success story
Née Caryn Elaine Johnson, Whoopi Goldberg découvre toute petite Star Trek à la télévision. Lorsqu'elle voit le personnage de Uhura pour la première fois, elle s'étonne auprès de sa mère : "Regarde maman ! Il y a une femme noire à la télé et ce n'est pas une domestique !"
Après une période noire où elle quitte ses études, tombe dans la drogue et épouse son dealer, elle se consacre à la comédie. Alors qu'elle participe à un projet expérimental, elle est repérée par Mike Nichols (Le Lauréat) qui lui offre le premier rôle d'un spectacle sur Broadway. Intitulé Whoopi Goldberg, le show attire les foules pendant près d'un an. Auréolé des succès des Dents de la mer et E.T., Steven Spielberg la découvre sur scène et lui offre le premier rôle de La Couleur pourpre. Applaudie pour sa performance, Whoopi Goldberg est nominée aux Oscars avec Oprah Winfrey et explose aux yeux du monde entier.
La rampe du succès
L'actrice dramatique ne tarde pas à retrouver sa verve comique. Avec Jumpin' Jack Flash, Pie voleuse et Fatal Beauty, Whoopi Goldberg devient une reine de la comédie populaire et rencontre au passage son mari, le directeur de la photo David Claessen. Obligée par contrat de tourner Telephone, elle attaque les producteurs pour empêcher la sortie du film qu'elle juge mauvais, mais perd. La comédie est un échec, et son mariage ne tient pas. Whoopi Goldberg divorce.
Fan de la série Star Trek depuis l'enfance, elle décroche un rôle récurrent dans Star Trek : La nouvelle génération. Elle retrouve ensuite le registre comique et le succès critique avec Le secret de Clara et The long walk home avec Sissy Spacek, sur le Mouvement des droits civiques. Sur ce tournage, les producteurs de Ghost viennent lui proposer le rôle de la voyante hystérique Oda Mae Brown. Avec cette performance, Whoopi Goldberg scelle son destin de reine de la comédie. Cinquante ans après Hattie McDaniel pour Autant en emporte le vent, elle devient la deuxième actrice afro-américaine à remporter un Oscar.
Comedy queen
Après un passage à la télévision dans la série Bagdad Café, adaptée du film culte, Whoopi Goldberg touche les sommets du box office avec Sister Act, une comédie déjantée où elle campe le témoin d'un meurtre caché dans un couvent pour échapper aux assassins. Avec 100 millions de dollars récoltés et une nomination aux Golden Globes, Whoopi Goldberg est une star incontournable.
Outre l'inévitable Sister Act 2, la comédienne rempile dans la comédie avec Made in America avec Ted Danson, Corrina, Corrina avec Ray Liotta, Avec ou sans hommes avec Drew Barrymore ou encore Bogus avec Gérard Depardieu. Pour Les fantômes du passé avec James Woods, elle retouche au drame, mais reste avant tout une comique.
Désormais appelée "Whoopi" sur les affiches de ses films, elle présente les Oscars quatre fois entre 1994 et 2011 et amène un vent de folie sur la cérémonie. Pour rendre hommage à Moulin Rouge !, elle apparaît notamment sur une balançoire descendue du plafond dans une tenue dorée, directement inspirée d'une scène avec Nicole Kidman.
Malgré le succès, Whoopi Goldberg reste lucide et ne manque pas une occasion de poser un regard critique sur sa carrière : "Rien de ce que j'ai fait ne fait guérir un cancer. C'est du divertissement plus ou moins bien. Ghost est un bon petit film, comme Jumpin' Jack Flash. Pie voleuse et Le secret de Clara aussi. Il y en a d'autres que j'aime moins. Le scénario de The Telephone était brillant mais le résultat, non. Je ne suis pas folle de Fatal beauty non plus, qui aurait pu être mieux. J'ai fait des choses bien, et d'autres, moins bien. Comme n'importe quelle carrière".
La reconversion TV
Avec la fin des années 90, Whoopi Goldberg se retire dans les seconds rôles au cinéma, comme dans Une vie volée avec Angelina Jolie et Aussi profond que l'océan avec Michelle Pfeiffer. Toujours très populaire grâce à son franc-parler, elle déclenche une polémique lors d'une soirée organisée en faveur du candidat démocrate John Kerry avec une blague de mauvais goût sur George W. Bush.
Animatrice et productrice du jeu Hollywood Squares, Whoopi Goldberg ne rencontre pas le succès espéré avec la sitcom Whoopi, entièrement pensé pour elle. Retournée dans l'ombre, elle crée la série médicale La vie avant tout, qui dure six saisons, et le programme pour enfants Whoopi's littlerburg.
Choisie par Rosie O'Donnell pour la remplacer à la tête de l'émission The View, un talk show très populaire outre-Atlantique, elle ne mâche pas ses mots pour exprimer ses idées. Ses prises de position sur l'actualité lui attirent parfois les foudres des médias américains et elle n'hésite pas à s'opposer à ses collègues en direct. Mais la télévision lui offre un confort certain et elle conserve sa place dans le coeur du public américain depuis une dizaine d'années.
Ces dernières années, les occasions d'apercevoir Whoopi Goldberg sont restées rares. Comme dans les séries Tout le monde déteste Chris et Entourage, l'actrice se prête régulièrement au jeu du caméo. L'année dernière, elle incarnait Dieu pour Kate Hudson dans la comédie A little bit of heaven, et elle répondait à l'appel de For colored girls, un drame sur la condition des femmes avec Thandie Newton et Janet Jackson. Les plus attentifs auront reconnu sa voix dans Toy Story 3, où elle incarnait la méchante pieuvre Stretch, tandis que les nostalgiques se souviendront que l'actrice a donné de la voix dans la comédie musicale Sister act. Mais à moins d'être branché sur la télévision américaine, Whoopi Goldberg semble vouloir rester loin des écrans.
Geoffrey Crété