Sur le compte Twitter de Manik Sethisuwan, un médecin, photographe amateur et producteur/réalisateur de films thaïlandais, on peut voir la photo d'un manifestant dans son pays qui fait un salut faisant référence à celui des révoltés de la saga Hunger Games. En légende du cliché : "Cher #HungerGames. Nous avons fait nôtre votre signe. Notre lutte n'est pas une fiction. Merci. #ThaiCoup #Thailand."
Les trois doigts joints et le pouce et l'auriculaire repliés, le bras tendu : cela forme le signal de rébellion qu'on retrouve dans Hunger Games, la saga dystopique, désormais franchise au cinéma, signée Suzanne Collins. L'héroïne Katniss l'explique ainsi : "C'est un vieux signe, rarement utilisé, qui vient de notre district, que l'on voit parfois aux enterrements. Il sert à remercier, à exprimer l'admiration, à dire au revoir à quelqu'un qu'on aime", rapporte Le Monde. Un geste dangereux puisqu'il entraîne les représailles des autorités pour ceux qui ont osé le faire.
En Thaïlande comme partout dans le monde, Hunger Games connaît un succès important. Mais dans ce pays d'Asie, il a un écho particulièrement fort. L'armée a pris le pouvoir après plus de sept mois de crise entre les "chemises jaunes" ultraroyalistes et leurs adversaires, les "chemises rouges". La loi martiale a été proclamée et toute manifestation ou rassemblement de plus de cinq personnes est interdit.
"Montrer les trois doigts est devenu un symbole pour appeler à des droits politiques de base dans un pays dirigé par une personne", le général Prayut Chan-O-Cha, a écrit sur Facebook Sombat Boonngamanong, célèbre militant recherché par la junte. Certains militants ont également été vus lisant dans la rue 1984, le roman de George Orwell dénonçant le totalitarisme.
L'armée a expliqué avoir pris le pouvoir pour restaurer l'ordre public après sept mois de manifestations contre le gouvernement de Yingluck Shinawatra, soeur de Thaksin. Le général Prayut a indiqué la semaine dernière qu'il n'y aurait pas de législatives avant au moins un an, afin de permettre dans l'intervalle la rédaction d'une nouvelle Constitution et de tenter de mettre un terme à près de dix ans de troubles politiques, rappelle l'AFP.
Depuis le putsch de 2006, le royaume est en effet englué dans une série de crises entre les ennemis et les partisans de Thaksin. Malgré son exil, le milliardaire reste le facteur de division de la société entre les masses populaires du Nord et du Nord-Est, qui lui sont fidèles, et les élites de Bangkok proches du palais et soutenues par l'armée, qui le voient comme une menace pour la monarchie.
Les autorités thaïlandaises vont-elles interdire la sortie de Hunger Games - La Révolte (partie I et II) ?