Depuis les accusations de viols et d'agressions sexuelles dont fait l'objet Gérard Depardieu, et surtout depuis la diffusion du numéro de Complément d'enquête dans lequel il semble sexualiser une petite fille, Gérard Depardieu se fait le plus discret possible. Du côté du monde de la culture, deux camps se dessinent : celui qui estime que la moindre accusation devrait lui coûter sa carrière en appelant au boycottage, et celui qui attend que la justice fasse son travail et opte pour la présomption d'innocence en attendant le verdict d'un juge.
Karine Silla opte pour cette deuxième catégorie. L'actrice et scénariste a partagé la vie de Gérard Depardieu dans les années 90. S'ils n'ont pas été mariés, ils ont eu un enfant ensemble : Roxane Depardieu, née en janvier 92. Après leur séparation, chacun a refait sa vie mais les liens sont restés indéfectibles. C'est en tout cas ce que Karine Silla indique dans une longue interview accordée à Paris Match dans laquelle elle prend également la défense du père de sa fille.
Comme elle le rappelle si bien, Karine Sylla a mis un temps avant de se décider à prendre la parole étant donné sa proximité avec Gérard Depardieu : "J'ai longuement réfléchi avant de m'exprimer. Parce que, comme on sait, il est difficile pour un chirurgien d'opérer son propre enfant ou pour un juge de mener un procès équitable si l'accusé est un membre de sa famille. Gérard Depardieu est un homme que j'aime depuis 35 ans, et avant tout le père de ma fille."
Si Karine Sylla évoque l'affaire Depardieu et estime que "Gérard n'est pas un prédateur sexuel", ce qu'elle déplore le plus, c'est que la justice des réseaux sociaux passe avant la justice tout court : "La justice est une ruche. Les personnes qui composent le corps judiciaire accomplissent un travail d'abeilles, minutieux et patient. Dans un tribunal, la parole de la défense est entendue. Rien de tel avec cette nouvelle justice rendue sur les réseaux sociaux et dans les médias. La présomption d'innocence est un terme devenu insupportable à entendre pour certains. Les mots de la justice ont été vidés de leur sens. Au lieu d'"accusés", on parle de "coupables", au lieu de "plaignantes", de "victimes. On juge donc avant que la justice soit passée."
Ce que Karine Silla ne supporte pas non plus, ce sont les propos tenus par Gérard Depardieu transformés en actions qu'il n'aurait pas commises : "Son humour grivois et grossier est avancé comme preuve de ses déviances. Mais depuis quand les paroles sont-elles synonymes d'actes ? Je n'ai pas ri quand on voyait les marionnettes de Canal+ rire de la mort de la princesse Diana. Je n'ai pas ri des une de Charlie hebdo. [...] Je trouvais ça violent, choquant, mais on m'a répondu : c'est l'humour français et la France, c'est la liberté de parole et d'opinion à tout prix. Au nom de cette liberté, de penser et d'opinion et au nom de l'humour, le monde démocratique est descendu dans la rue et j'en faisais partie." Pour elle, pas de raison donc que Gérard Depardieu n'en bénéficie pas.
Et elle n'hésite pas à mettre en cause tous ceux qui rigolaient aux blagues que beaucoup de femmes évoquent et comparent aujourd'hui comme des agressions et des comportements déplacés envers elles : "Les plaignantes de ses comportements déplacés racontent presque toute la même chose : ça se passait devant l'équipe, et les gens ne disait rien, à part : 'c'est Gérard.' [...] Lui faisait du spectacle pour amuser la galerie, tournant sa tête de gauche à droite pour voir si on riait, et les autres riaient et applaudissaient. Je rappelle que les prisons sont pleines de détenus qui purgent des peines de complicité. Alors, si la justice décide que les comportements de Gérard sont pénalement répréhensibles, ils sont où, tous ceux-là, pendant la mise à mort d'aujourd'hui ?"
Loin de traiter les plaignantes de menteuses, Karine Silla a du mal à imaginer Gérard Depardieu comme décrit dans leurs récits. L'idée même qu'il puisse faire du mal à une femme est impossible : "Ce dont je peux témoigner, c'est que toutes les femmes qui ont partagé son intimité amoureuse s'accordent à dire une chose essentielle : Gérard n'est pas un prédateur sexuel. Gérard est un homme délicat dans l'intimité amoureuse avec une femme. L'intimité lui inspire le respect et une certaine timidité, il préfère parler de poésie . [...] Il n'a pas la volonté ni le fantasme de dominer les femmes. Il a eu pour amies des femmes libres, celles qui ne sont pas sous l'emprise d'un homme, d'un patriarcat ou d'un parti politique, qui osent parler et agir à contre-courant." Un soutien qui fera sûrement chaud au coeur de Gérard Depardieu.
L'interview de Karine Silla est à retrouver dans son intégralité dans Paris Match, ce jeudi 25 janvier 2024.