Pour défendre son nouvel album, intitulé 8, Anggun a accordé une grande interview au magazine Technikart qui lui consacre sa couverture. La star de 44 ans, née en Indonésie, revient sur son parcours incroyable, sa carrière précoce dans son pays natal, son amour pour la France ou encore ses engagements politiques. Elle dénonce, par exemple, l'hypocrisie autour du port du voile en Indonésie.
Qui se souvient qu'Anggun était une immense star en Indonésie dès son adolescence ? À 19 ans, alors qu'elle avait le monde à ses pieds, la jeune artiste, soutenue par son père, décide de revendre son label et de s'envoler pour l'étranger. À 20 ans, c'est l'exil. Trois ans plus tard, en 1997, la version française Snow on the Sahara (La neige au Sahara) devient un tube. Tecknikart rappelle que les différentes versions de cet album s'écoulent à plus d'un million d'exemplaires dans 35 pays. Une nouvelle aventure commence dans un nouveau pays...
"Ado, j'étais peut-être la chanteuse la plus célèbre d'Indonésie, j'aurais pu le rester et pourtant j'ai tout fait pour sortir de cette image de rockeuse FM à la Bon Jovi", raconte Anggun dans le mensuel. Elle est d'abord partie pour Londres, puis elle a trouvé son bonheur en France au point d'en adopter la nationalité en 2000. "Je suis française, je vis et je paye mes impôts en France depuis des années. J'aime tellement ce pays que j'ai choisi sa nationalité, l'Indonésie n'acceptant pas la bi-nationalité, ce qui n'a pas été sans douleur. Le père de ma fille est français, ma fille vit et étudie en France. Quant à moi, je crois que je suis devenue définitivement française depuis que je n'arrête pas de parler de nourriture." Le romancier Cyril Montana et Anggun sont les parents d'une petite Kirana qui aura 11 ans en novembre. Depuis quelques années, la chanteuse vit avec Christian Kretschmar.
C'est aussi ça, l'Indonésie d'aujourd'hui
Pour autant, Anggun reste très attachée à l'Indonésie, un pays qu'elle a vu changer. L'artiste musulmane explique ne pas correspondre à l'idéale de la femme javanaise "soumise et aimante". Anggun n'est pas plus silencieuse : "Non seulement je suis partie vivre à l'étranger et je ne suis pas voilée. Mais en plus, je m'exprime publiquement, je prends des positions politiques et j'ai changé de nationalité, ce que beaucoup ont vécu comme une trahison. Je crois que certains Indonésiens ne comprennent tout simplement pas que je puisse ouvrir la bouche..." Sur les réseaux sociaux, elle s'engage contre la corruption qui gangrène son pays, pour les droits des femmes et des personnes LGBT+. Elle n'a pas du tout cette image un peu lisse qu'on peut lui prêter en France et ses positions progressistes lui valent des menaces de mort. "Aujourd'hui, je ne peux plus me rendre là-bas sans être accompagnée de gardes du corps, c'est aussi ça, l'Indonésie d'aujourd'hui", raconte Anggun.
Elle dénonce le voile tel qu'il est imposé en Indonésie, un pays où il est interdit d'être athée, où il n'existerait qu'une manière de vivre sa foi : "Ce ne serait pas si dérangeant si ça ne participait pas d'une hypocrisie énorme. Voiler les femmes, c'est-à-dire tout de même les fermer aux autres, pour les préserver de la faiblesse des hommes au lieu de les responsabiliser. Tout ça sans éducation sexuelle, sans aucun débat public sur la sexualité. Et, croyez-moi, ça n'empêche pas les femmes voilées de se faire violer comme les autres..." Elle observe le président "Jokowi" essayer "d'apaiser un peu les choses en matière de religion" mais regrette que "les islamistes soient chaque jour plus bruyants".
Pour le magazine, elle évoque l'amour, l'argent et partage sa vision du féminisme. C'est un beau portrait que dresse Technikart d'une artiste à la personnalité finalement méconnue...