Vendredi 9 janvier, deux jours après la tuerie de Charlie Hebdo, la France découvrait en direct les images des tragédies de porte de Vincennes et de Dammartin-en-Goële. Trois événements qui ont coûté la vie à 20 personnes, dont les frères Kouachi, à l'origine du massacre des membres de l'équipe de la revue. Le décès des agresseurs est-il un soulagement pour les proches des défunts ? Jeannette Bougrab, compagne de Charb et Patrick Pelloux, médecin urgentiste et chroniqueur pour le journal, ont témoigné le 9 janvier sur le plateau du Grand Journal de Canal+.
Encore choquée et bouleversée par les événements, la membre du conseil d'état confie tout d'abord ne pas avoir réalisé que son compagnon était décédé. "J'ai encore son odeur, c'est très étrange mais c'est comme ça. On avait des projets. Des fois, il arrive quelque chose dans la journée et on se dit : 'Il faut que je lui dise'. On a ce réflexe en tout cas de tout se dire", confie-t-elle encore très émue. La mort des assassins de Charb et de tous les autres, ne peut en tout cas pas effacer la peine de Jeannette Bougrab. Pour elle, le combat n'est est de toute façon loin d'être terminé. Comme elle l'explique : "Tant mieux [s'ils sont morts, NDLR], je ne suis pas du genre à vous dire qu'il faudrait faire une enquête pour savoir qui est responsable ou si on a bien fait la procédure. Moi je n'ai aucun état d'âme là-dessus (...) je n'ai pas d'empathie. La seule chose qui me rend malade et me donne envie de vomir c'est qu'on n'a pas encore réglé le problème du fondamentaliste et de l'intégrisme en France."
Pour Patrick Pelloux, la mort des frères Kouachi n'est pas non plus un soulagement. Le médecin qui a avoué n'avoir quasi pas dormi depuis le drame a ajouté très ému : "Quel gâchis, personne ne reviendra..." Pour lui, le combat passe aussi par la survie de Charlie Hebdo et hier, pendant que la France entière suivait les prises d'otage, Patrick Pelloux et les différents contributeurs du canard travaillaient au numéro à paraître la semaine prochaine. "Il y a eu une discipline autour de la table et il y en a, à un moment, qui ont envoyé des vannes qui étaient pas mal et on a commençait à sourire. Là j'ai dit tiens, le moteur est reparti", confiait-il au sujet de la conférence de rédaction. Des sourires qui n'effacent pas les nombreuse blessures. Comme il l'explique : "On s'est retrouvé et on gère une somme de psycho-traumatismes complexes entre ceux qui y étaient et n'ont pas été tués, ceux qui auraient dû y être et ceux qui n'y étaient pas et sont arrivés après."
Sarah Rahimipour