Un entrepreneur franco-algérien qui décide de tenter de participer aux JO d'hiver pour sauver sa fabrique de ski, le pitch de Good Luck Algeria intrigue. Au casting, un acteur césarisé (Les Témoins) et prix d'interprétation cannois (Indigènes), Sami Bouajila, un comédien et réalisateur de films potaches (Pattaya), Franck Gastambide, et une actrice plus habituée aux films d'auteur dramatiques qu'aux feel good movies, Chiara Mastroianni. Derrière la camera, un jeune réalisateur qui signe son premier long métrage, Farid Bentoumi. Après la projection du film en avant-première dans le cadre des projections 300 d'Allociné, le verdict tombe : cette comédie réussit à toucher le spectateur en plein coeur.
Lorsque le générique de fin s'est achevé, les trois acteurs principaux et le réalisateur montent sur scène. Enthousiastes et sereins, ils défendent une oeuvre qui sonne juste. Pour Chiara Mastroianni – et ses deux partenaires acquiesceront –, le film aborde des thèmes souvent traités au cinéma sans finesse et avec démagogie, mais celui-ci ne sombre jamais dans ces écueils. La fille de Catherine Deneuve et Marcello Mastroianni se réjouit aussi d'avoir été choisie pour une comédie : "J'ai été très surprise que Farid ait pensé à moi. En général, c'est très dramatique, ce que je fais. Entendre une salle rire, je n'ai pas l'habitude."
Bulles de réalité
Le réalisateur Farid Bentoumi est clair : il voulait montrer une intégration réussie et une mixité heureuse, celle d'une majorité de gens qu'on ne voit pas assez. Par les temps qui courent, cela fait un bien fou. Pour que la recette prenne et ne soit jamais trop sucrée, il a choisi un scenario inspiré de "bulles de réalité" : l'histoire de son frère (qui a tenté les JO de Turin en 2006). C'est d'ailleurs lui qui double Sami Bouajila dans les scènes de ski. Franck Gastambide aussi a été doublé : "Je n'avais jamais fait de ski de ma vie. On a rapidement pris une doublure." Et son partenaire Sami Bouajila d'ajouter : "Pour prendre une attitude de sportif, il a fait son footeux." Une amitié est née entre les deux hommes, si bien que Sami fait ainsi une apparition dans la dernière réalisation de Franck, Pattaya.
Pour les besoins du scénario, le réalisateur a créé un rôle de soeur, alors qu'il n'en a pas : "Je voulais un contre-point. L'héritage qu'elle n'a pas, ce qu'elle a fait." On soulignera à quel point les personnages féminins, certes secondaires, sont touchants et justes, loin de l'hystérie ou l'aspect potiche auquel certains rôles féminins se cantonnent. "Mon frère a lu la première version, il me disait mais 'pourquoi tu fais un film dessus, tout le monde s'en fout'." En voyant ce film, le frère du metteur en scène a réalisé quelle jolie dimension avait pris son aventure.
Tourné au Maroc et pas en Algérie – la mort d'un Français dans le pays les en a empêchés –, Good Luck Algeria parle évidemment des racines et des dilemmes qui peuvent en découler. Et pour évoquer cela, qui de mieux qu'un père aussi attaché à son pays d'origine qu'à celui qui l'a accueilli. Le personnage est incarné avec une tonne de tendresse par Bouchakor Chakor Djaltia. Non professionnel, il a été découvert par le réalisateur au sein d'une association d'Algériens. "Il est à l'image de mon père, raconte Sami Bouajila. Je savais comment le mettre à l'aise. Ça le rassurait. C'est un monsieur avec un vécu incroyable. Plein d'amour." Comme le film.
Good Luck Algeria, en salles le 30 mars