Passée l'euphorie de la victoire - attendue - de Christiane Taubira à la primaire populaire ce 30 janvier 2022, la candidate à l'élection présidentielle 2022 doit faire aux réactions des différentes personnalités de la gauche. Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'elle n'est pas accueillie à bras ouverts.
Favorite de cette primaire où ont voté 392 738 participants sur les 467 000 inscrits, l'ancienne ministre de la Justice, lancée dans la campagne seulement depuis deux semaines, est devant un défi impossible pour rassembler un camp plus divisé que jamais. "Nous devons trouver un chemin de façon à rassembler les gauches et leurs sensibilités", a-t-elle déclaré devant l'AFP après sa victoire, appelant dans "un esprit de concorde", les militants, dirigeants et "élus de terrain" socialistes, écologistes, insoumis et communistes, à se rassembler avec elle. Pour cela, elle compte appeler Yannick Jadot (leader d'Europe Ecologie les Verts, arrivé 2e), l'InsoumisJean-Luc Mélenchon (3e) et la socialiste Anne Hidalgo (seulement 5e), mais aussi le communiste Fabien Roussel, non-sélectionné pour la Primaire populaire. "Je sais leurs réticences, mais aussi leur intelligence et leur sens de l'intérêt général", a-t-elle souligné. "Cette union, nous la construisons ensemble", a-t-elle ajouté, devant des militants survoltés qui scandaient "union, union".
Les réactions ont été cinglantes après cette annonce. "Elle a enfilé la chaussure qui a été préparée pour elle, je ne suis pas concerné, c'est leur affaire", a réagi le candidat LFI Jean-Luc Mélenchon sur France 5, ajoutant en avoir "un peu marre des appels téléphoniques où on me prend pour une bille", référence à un récent coup de fil de l'ex-candidat Arnaud Montebourg qui était également en quête d'union avant de jeter l'éponge. Interrogé par TF1 sur ce qu'il avait à dire à la gagnante, Yannick Jadot a lui répondu : "Rien". "C'est une candidature de plus, exactement l'inverse de ce que souhaitait la primaire populaire", a estimé le candidat écologiste, en costume-cravate. Quant à Anne Hidalgo, "non", elle ne se sent pas non plus engagée par ce résultat. "Ça aurait pu être un moment de rassemblement de toute la gauche, c'est une candidature de plus", a-t-elle abondé.
Manuel Bompard, directeur de campagne de Jean-Luc Mélenchon, a carrément dénoncé un "spectacle pathétique". "On est à 70 jours de l'élection la plus importante de la 5e ou 6e puissance économique du monde (...) et, contrairement à ce qu'elle avait dit en décembre, madame Taubira sera donc une candidate de plus à gauche", a-t-il grincé sur BFMTV. De son côté, l'écologiste Sandrine Rousseau a ironisé sur Twitter : "Je propose que (François) Hollande se déclare maintenant", ajoutant le hashtag "fatigue" à ses propos.
Selon ses proches, Christiane Taubira doit donner à ses concurrents un ultimatum à la mi-février pour se rassembler avec elle. Même si elle est pour l'instant donnée autour de 5% des intentions de vote, son entourage espère que les prochains sondages, "entre le 5 et le 10 février", montreront qu'"elle bénéficie d'un fort capital d'adhésion et d'enthousiasme dans le pays". "Si le résultat est franc et massif, ça va ébranler des certitudes", analyse son entourage, persuadé que les défections vont s'accumuler dans les prochains jours dans le camp Hidalgo, en difficulté autour de 3% des intentions de vote, et le camp Jadot, lui aussi coincé entre 5 et 7%. A l'heure actuelle rappelle l'AFP, la gauche se situe à un score historiquement bas dans les sondages, avec seulement un quart des intentions de vote, loin derrière le président et quasi candidat Emmanuel Macron, favori avec environ 25%, suivi au coude-à-coudes de Marine Le Pen (RN) et Valérie Pécresse (LR).