Icône du septième art, Claudia Cardinale a eu mille vies, et pas seulement sur les grands écrans de cinéma du monde entier. Dans une interview publiée par Le Monde le 14 mai, la muse de la 70e édition du Festival de Cannes a révélé avoir été victime d'un viol, dont la conséquence aura été une grossesse non désirée puis la naissance d'un petit garçon dont elle racontera, pour préserver sa carrière, qu'il était son frère et non son fils.
"Je ne serais pas arrivée là si la naissance de mon petit garçon, à la suite d'un viol, ne m'avait poussée à m'engager dans le cinéma pour gagner ma vie et être indépendante. C'est pour lui que je l'ai fait. Pour Patrick, ce bébé que j'ai voulu garder malgré les circonstances et l'énorme scandale que pouvait susciter alors une naissance hors mariage", confie-t-elle. La jolie Claudia Cardinale d'alors se dit "farouche, pudique, presque sauvage" mais surtout "sans la moindre envie de s'exhiber sur des plateaux de cinéma". "Mais voilà : un hasard m'avait fait gagner à 17 ans, en 1955, l'élection de La Plus Belle Italienne de Tunis, alors que je ne m'étais pas présentée. La récompense était un voyage à la Mostra de Venise, où je suis allée avec maman et où mon bikini, sur la plage du Lido, a attiré l'attention des réalisateurs, que j'ai tout de suite éconduits. Un journal a même fait mon portrait en titrant 'La fille qui ne veut pas faire de cinéma'. Mais les sollicitations se sont multipliées. Mon père s'est mis à recevoir des tas de télégrammes et a fini par dire : 'pourquoi pas ?'", raconte-t-elle.
J'ai été contrainte à assumer ce mensonge pour éviter le scandale et protéger ma carrière
"Entre-temps, le drame qui était survenu et l'arrivée prochaine d'un bébé – que je gardais secrète – m'ont convaincue de foncer", poursuit-elle. Elle bénéficie de l'aide d'un grand producteur italien, Franco Cristaldi, qui la prend sous son aile. "J'ai tourné enceinte, personne ne s'en rendait compte, car la taille des vêtements, alors, était située juste sous la poitrine, se souvient-elle. On a organisé discrètement mon accouchement à Londres. Et c'est ainsi que le bébé a été nommé Patrick. Parce qu'on l'a baptisé à la St Patrick's Catholic Church. Le même producteur a eu l'idée de raconter que le bébé était mon petit frère. Et j'ai été contrainte à assumer ce mensonge pour éviter le scandale et protéger ma carrière."
Un mensonge que l'actrice regrettera toute sa vie, parlant d'un "poids". "Quand Patrick a eu 6 ou 7 ans, j'ai appelé un journaliste et avoué que c'était mon fils. C'était une époque étrange, vous savez, où les acteurs étaient totalement dépendants d'un producteur avec qui ils étaient sous contrat, donc pieds et poings liés. J'ai très vite enchaîné les succès, fait quatre films par an, mais je suis restée salariée comme une simple employée et n'étais pas libre de mes sorties, de mon maquillage et de ma vie personnelle. J'ai d'ailleurs appris bien plus tard que le père de mon fils m'avait envoyé de nombreuses lettres, que le producteur a déchirées sans jamais m'en faire part. Il voulait reconnaître l'enfant. Quand je l'ai su et que j'ai interrogé Patrick pour savoir s'il voulait faire sa connaissance, il a refusé catégoriquement. Tout cela a été très tourmentant. Et mon fils en a souffert", raconte la star de Huit et demi, Le Guépard ou Il était une fois dans l'Ouest.
Ce fils longtemps secret "aborde aujourd'hui la soixantaine". "Et nous avons heureusement gardé tous les deux, lui qui vit désormais à Rome, après New York, et moi qui vis à Paris, un excellent rapport. La famille est essentielle", se félicite l'actrice de 79 ans.