L'écrivain Cesare Battisti, 56 ans, a été libéré de prison mercredi 7 juin, après que la Cour suprême du Brésil a rejeté son extradition vers l'Italie. Son avocat français, Eric Turcon, a exprimé jeudi sa "très grande satisfaction" après la libération de son client, ex-activiste italien d'extrême-gauche, remis en liberté dans la nuit de mercredi à jeudi au Brésil, où il était incarcéré depuis quatre ans.
La libération de ce protagoniste des "années de plomb", dans les années 1970 en Italie, où il a été condamné à la réclusion à perpétuité pour quatre meurtres et complicité de meurtres à la fin des années 1970, met sans doute un point final à une cavale de 30 ans, suivie d'une bataille judiciaire et d'une crise diplomatique avec Rome. Le gouvernement italien était fort en colère hier soir et parlait d'énième humiliation pour les victimes.
Après s'être réfugié en France en 1990, Battisti avait entamé une carrière d'écrivain, quand en 2004 (14 ans plus tard !), la France se prépare à céder face à l'insistance des autorités italiennes réclamant son extradition. Battisti prend la fuite alors qu'il est sous contrôle judiciaire. Il est soutenu par un comité de protestation composé surtout de personnalités de gauche (Fred Vargas en tête, [people_restrictif=2056]Bernard-Henri Lévy[/people], Guy Bedos, l'abbé Pierre, Bertrand Delanoë). Il s'était réfugié au Brésil, où il fut arrêté le 18 mars 2007. Commença alors un long bras de fer entre la justice brésilienne et italienne.
En 2009, la presse italienne s'était déchaînée contre Carla Bruni, l'accusant d'avoir plaidé la cause de Cesare Battisti lors d'une visite officielle de Nicolas Sarkozy au Brésil. La première dame s'en était défendue à la télévision italienne. Si l'opinion italienne s'était promptement acharnée sur Carla Bruni, c'est parce qu'avec sa soeur Valeria, elles avaient publiquement apporté leur soutien à l'ex-membre des Brigades rouges Marina Petrella. Nicolas Sarkozy avait finalement refusé de l'extrader pour raisons de santé. Les destins de Petrella et Battisti sont assez similaires.
C'est accompagné de ses avocats que Cesare Battisti, vêtu d'un pantalon clair et d'une chemise blanche, est apparu serein devant la foule de reporters et de photographes postés devant la prison de haute sécurité de Papuna. Il n'a fait aucune déclaration en retrouvant la liberté. Quelques heures plus tôt, les juges de la Cour suprême avaient jugé par six voix contre trois que l'Italie ne pouvait contester la décision souveraine de l'ex-président Luiz Inacio Lula da Silva de ne pas extrader Battisti.
Devant le courroux des italiens, Me Turcon a déclaré à l'AFP : "N'oublions pas que Battisti clame son innocence, après avoir été condamné en Italie par contumace pendant une période d'exception, par des juges d'exception et dans le cadre de lois d'exception. (...) Il ne représentait rien, il a été balancé par son chef de réseau qui a disparu."
L'avocat a également rendu hommage à l'écrivain français Fred Vargas, soutien de la première heure de M. Battisti, qui lui a rendu visite en prison au Brésil à plusieurs reprises. "Elle a fait un travail inouï, s'est engagée. Au Brésil, elle a rencontré chaque personne susceptible d'avoir une quelconque influence" sur l'affaire, a-t-il souligné.
Cesare Battisti doit maintenant obtenir un visa de résident permanent au Brésil, pays qu'il ne pourra quitter sous aucun prétexte, sinon il serait extradé immédiatement en Italie.