Johnny Hallyday était-il plus français ou américain ? Telle a été en substance l'objet des débats qui se sont tenus ce 29 mars 2019 au tribunal de grande instance (TGI) de Nanterre (Hauts-de-Seine). Pour rappel, le rockeur décédé le 5 décembre 2017 d'un cancer du poumon qui s'est généralisé, a rédigé son testament aux Etats-Unis, faisant de son épouse Laeticia Hallyday et leurs deux filles Jade (14 ans) et Joy (10 ans) les seules héritières.
Ce nouveau rendez judiciaire crucial devait servir à statuer sur la compétence du tribunal français dans le dossier de l'héritage de Johnny Hallyday. Si la "résidence habituelle" du chanteur est attribuée aux Etats-Unis, c'est alors le droit américain qui s'appliquera dans cette affaire et inversement si le TGI considère que le Taulier était un résident français.
Lors de l'audience qui s'est ouverte peu avant 14 heures et qui s'est achevée peu avant 17 heures, les avocats de Laeticia Hallyday ont été les premiers à s'exprimer. Avant même ce rendez-vous, ils avaient soulevé une question de procédure, estimant que ce n'était pas à un tribunal français mais à une juridiction américaine de trancher le litige. Lors de son intervention devant la juge, maître Arnaud Albou, accompagné de maître Ardavan Amir-Aslani, ont d'emblée prouvé que Johnny Hallyday a passé plus de temps aux Etats-Unis qu'en France. "En 2015, il a passé 188 jours aux États-Unis contre 158 en France. Et en 2016, 195 jours aux États-Unis contre 168 en France", a-t-il fait savoir comme le rapporte Le Parisien présent durant toute la durée de l'audience. L'avocat a également révélé que le chanteur avait demandé la nationalité américaine et qu'il aurait dû obtenir sa green card (carte verte) en 2019, après les cinq ans de la procédure légale. L'époux de Laeticia Hallyday possédait tous les éléments qui pouvait faire de lui un Américain : sécurité sociale, compte en banque, permis de conduire.
Me Arnaud Albou a également rappelé que Johnny ne souhaitait pas vivre ses instants dans l'Hexagone. "Il a fait le choix de suivre un nouveau traitement en France. Il n'avait qu'une envie c'était de rentrer aux États-Unis. Il ne comptait pas mourir en France. Et jamais il n'a jamais demandé d'hommage national", a-t-il défendu. (Le Taulier avait effectivement prévu de rentrer à Los Angeles en septembre 2017 mais l'aggravation de son état de santé et son nouveau traitement avaient rendu ce départ impossible NDLR).
Préparé à être attaqué sur le sujet de l'enterrement du chanteur à Saint-Barthélemy, l'avocat avait préparé sa réponse : "certes c'est en France mais c'est une île paradisiaque pour lui." L'île des Antilles françaises occupait effectivement une place particulière dans le coeur de Johnny, Laeticia n'a fait que respecter son souhait de son mari.
Lors de cette audience, les avocats de Laura Smet et David Hallyday ont tout fait pour démontrer que leur père devait être considéré comme français. Isabelle Fleuret, avocate spécialiste des successions qui a plaidé pour David et Laura a défendu que, si Johnny Hallyday se considérait vraiment américain, il aurait inscrit ses deux filles dans un lycée américain et non au lycée français américain. Un argument faible puisqu'être scolarisé dans un lycée français aux Etats-Unis n'empêche pas d'être en contact avec la culture nationale. "Jade et Joy suivent le programme scolaire en français et peuvent ainsi faire appel à des précepteurs quand ils sont en France. On nous dit aussi qu'elles étaient en permanence au lycée de Los Angeles en 2017 et 2018. Or, on sait qu'elles étaient en France en septembre 2017, quand leur père était soigné et jusqu'à sa mort en décembre", a-t-il été plaidé.
L'avocate s'est ensuite appuyée sur les publications Instagram de Laeticia et Johnny Hallyday qui prouvent, selon elle, leur attachement à la France. Elle occupait certes une place particulière dans leur coeur mais leur vie était bel et bien aux Etats-Unis où Laeticia et ses filles se sont peu à peu reconstruites.
Le verdict de cette audience est attendu pour le 28 mai prochain, la juge ayant mis sa décision en délibéré.