Le 5 octobre, le journaliste Arnaud Ardoin publie "Président, la nuit vient de tomber", Le mystère Chirac. Ce livre choc, dont Paris Match publie les premiers extraits bouleversants dans son nouveau numéro, repose sur le témoignage de Daniel Le Conte qui a accompagné Jacques Chirac pendant quarante ans et a passé les trois dernières années de sa vie à son chevet. Le Conte est décédé le 18 juillet 2017 d'une crise cardiaque, à l'âge de 68 ans. Ce qu'il révèle de l'état de santé et des conditions de vie de Jacques Chirac est préoccupant...
Daniel Le Conte a commencé à suivre Jacques Chirac quand il s'est lancé dans la course à la mairie de Paris à la fin des années 1970. Il ne l'a jamais quitté. Arnaud Ardoin explique que "c'est Claude Chirac qui lui a demandé de veiller à son père, d'être à ses côtés pour qu'il reste digne en toutes circonstances (...) le tienne au courant de l'actualité" depuis qu'il a quitté l'Elysée. Daniel est devenu son confident, à ses côtés chaque jour. La dernière sortie publique de Jacques était pour les obsèques de sa fille Laurence en avril 2016. Et depuis ?
Dans son témoignage, Daniel Le Conte raconte le quotidien d'un couple qui ne fait plus que se croiser, la bienveillance de Claude, le choc de la mort de l'aînée Laurence ou encore le défilé des visiteurs. Le président et son compagnon de route avait cette habitude : "Chaque soir ou presque, il s'amuse à lui glisser cette petite phrase rituelle : 'Président, la nuit vient de tomber', et d'attendre, fébrile, sa réponse : 'J'espère qu'elle ne s'est pas fait trop mal...' Daniel sourit. Parce que cette petite réplique est un peu comme un thermomètre indiquant qu'il est en bonne santé, prouvant que le président est encore dans le présent. Tant qu'il peut répondre, quelque que soit le délai entre la question et la réponse, cela veut dire qu'il garde des moments de conscience et que la vie ne l'a pas quitté."
L'auteur compare la fin de vie de François Mitterrand, rongé par le cancer mais qui a conservé l'esprit clair jusqu'au bout, à celle de Chirac. Cruelle comparaison : "Jacques Chirac, lui, est immobile, seul au monde, alors que le mouvement et l'action ont été les moteurs de sa vie. Lui qui aime tant la liberté, est aujourd'hui enfermé vivant dans un monde de plus en plus inaccessible."
Jacques ne peut plus marcher. Le couple a donc quitté le quai Voltaire pour une résidence rue de Tournon, dans le 6e arrondissement de Paris. Bernadette Chirac fait sa vie à l'étage, Jacques est seul au rez-de-chaussée. Selon le livre, en plus de la présence permanente de Daniel Le Conte jusqu'à sa mort, l'ancien président est entouré de "six auxiliaires de vie qui s'occupent de [lui] jour et nuit". "Ils sont sa récréation et ses rayons de soleil. C'est comme une maison de retraite qui ne dit pas son nom", écrit l'auteur.
Puisque la mémoire flanche, Daniel Le Conte avait mis au point un stratagème pour que le président soit "présent" lorsqu'il recevait du monde : "Environ vingt minutes avant que le visiteur ne prenne place dans le bureau de Jacques Chirac, Daniel lui rappelle les derniers événements marquants de l'actualité, lui remémore la dernière prise de parole de son invité à la télévision. Le compte à rebours est alors lancé. Daniel est à l'affût, guette le moindre silence, qui pourrait laisser augurer que le président n'est plus connecté à la vie."
"Président, la nuit vient de tomber", Le mystère Chirac d'Arnaud Ardoin, ed. Cherche midi, 272 pages, 19 euros. En librairie le 5 octobre.