"Nouvelle embrouille" pour Karim Benzema, étalée en une de Libération : à peine l'attaquant du Real Madrid a-t-il pris connaissance de la levée de son contrôle judiciaire dans l'affaire du chantage à la sextape visant Mathieu Valbuena qu'un autre dossier, de "blanchiment en bande organisée" celui-là, le ramène dans les chroniques judiciaires.
Karim Benzema entre ombre et lumière : le portrait choisi par nos confrères de Libé pour leur édition de ce vendredi 18 mars 2016, qui produit des révélations exclusives concernant le footballeur de 28 ans, est on ne peut plus judicieux. Joueur talentueux, beaucoup d'ombres planent sur la personnalité du goleador et ses relations, que la justice tente de dissiper. Au lendemain de l'annonce par Didier Deschamps de la sélection retenue pour les deux prochains matchs amicaux de l'équipe de France, liste dont Benzema ne fait pas partie, le quotidien annonce dans une enquête très renseignée d'Emmanuel Fansten qu'il a été "discrètement entendu comme témoin dans le cadre d'une information judiciaire pour blanchiment en bande organisée" et "blanchiment de trafic de stupéfiants". Une affaire qui, écrit l'auteur, "pourrait être bien plus explosive que celle de la sextape".
Tout commence par une banale affaire de stups.
Ouverte le 17 septembre 2015 par la parquet de Paris et confiée au juge émérite du pôle financier Renaud Van Ruymbeke (affaires des frégates de Taïwan, Clearstream 2, Kerviel, Cahuzac, Thomas Fabius...), l'enquête porte sur l'acquisition et l'exploitation d'un fonds de commerce à proximité des Champs-Élysées qui aurait possiblement abrité des manoeuvres financières. "Tout commence à l'été 2015, écrit Emmanuel Fansten, par une banale affaire de trafic de stups" : les écoutes téléphoniques mises en place par les agents du Service national de douanes judiciaires (SNDJ) les mènent "directement à Karim Benzema et à son entourage" et conduisent, suite à la découverte de faits de blanchiment, à l'ouverture d'une information disjointe.
Au coeur des investigations : BH Event's, société dont Karim Benzema est le principal actionnaire (45%) et créée en septembre 2014 dans le "but précis" de "racheter un fonds de commerce rue Marbeuf, dans le 8e arrondissement de Paris, pour y construire un restaurant branché". Le futur Cosy. Le même mois, BH Event's fait en ce sens une offre à 1,45 million d'euros, "aussitôt acceptée par le vendeur"... en dépit du montant bien en-deçà des prix du marché pour un tel bien – 3 ou 4 millions d'euros, selon des experts sollicités par le journaliste. À cela s'ajoute "une clause prohibitive" obligeant les éventuels acquéreurs "à quitter les lieux au plus tard en 2017". L'enquête de Libération précise que Karim Benzema "a délégué tout pouvoir à son associé dans la société, Steve G., tout en se portant caution à hauteur de 2,5 millions d'euros pour la vente", ce qui a permis à BH Event's de contracter un prêt auprès d'une agence LCL à Lyon. Karim Benzema à nouveau victime de ses amitiés et de sa loyauté, comme dans le cas de son rôle d'intermédiaire pour son copain d'enfance Karim Zenati concernant le chantage dont a été victime Mathieu Valbuena ? "Karim s'est fait avoir, il a perdu beaucoup d'argent dans cette histoire", assure en l'occurrence son entourage...
Les douaniers s'interrogent sur le montant total des commissions. "Au moins 650 000 euros auraient été versés aux différents intermédiaires", soit près de la moitié du prix de vente, selon les informations de Libération, pour qui cet élément est "le détail qui a fait tiquer les enquêteurs", mis sur la trace de dessous de table et d'un "gros bonnet du trafic de drogue qui aurait cherché à blanchir son magot". Inauguré début 2015, le Cosy s'avère vite être un gouffre financier, malgré sa situation avantageuse, son positionnement et sa physionomie. En juillet 2015, ses propriétaires tentent de le revendre... 3,5 millions d'euros (soit le montant investi pour sa création), mais peineront à s'en défaire, finalement pour 1,6 million d'euros. "C'est le footballeur qui appellera lui-même l'acheteur pour confirmer le deal et se porter garant", révèle encore Emmanuel Fansten, qui récapitule alors les interrogations quant au rôle de Karim Benzema ("berné par son entourage ?"), aux éventuels blanchiments et à la provenance des fonds.
Et de promettre que ce n'est qu'un début, puisque "les enquêteurs s'intéressent à d'autres opérations du même type, entre Paris et Lyon". Potentiellement bien plus explosif que la sextape, effectivement...