Huit jours après son décès survenu à l'âge de 81 ans des suites de la maladie d'Alzheimer, disparition suivie d'un deuil national de trois jours en Espagne, Adolfo Suarez, ancien chef du gouvernement (de 1976 à 1981), recevait lundi 31 mars 2014 l'hommage vibrant de la nation lors de funérailles d'Etat que présidait la famille royale.
Le roi Juan Carlos Ier, qu'on avait pu voir particulièrement bouleversé le lundi précédent, lorsqu'il était allé se recueillir au Congrès devant la dépouille de son ancien allié dans la mise en place de la transition démocratique à la fin des années 1970, affichait encore une mine grave, à son arrivée peu avant 19 heures à la cathédrale de La Almudena, à Madrid. Il était accompagné de son épouse la reine Sofia, ainsi que de son héritier le prince Felipe et de la princesse Letizia. Le prince et la princesse des Asturies, qui s'étaient tous deux parés de rose pour inaugurer à Barcelone le salon Alimentaria quelques heures plus tôt, avaient eux aussi pu se recueillir quelques instants devant le cercueil d'Adolfo Suarez, le 24 mars, au lendemain de sa mort. De son côté, l'infante Elena assistait en la paroisse madrilène San Francisco de Borja, avec ses enfants Felipe et Victoria, à une messe de funérailles à la mémoire de leur grand-mère la comtesse de Ripalda, mère de son ex-époux Jaime de Marichalar, décédée le 13 mars.
Adolfo Suarez Illana, le fils du défunt, était là pour accueillir le monarque, avec une chaleureuse étreinte comme celle qu'ils avaient échangée à la chapelle ardente une semaine auparavant. Une marque d'affection, reproduite avec Felipe, qui en dit long sur les liens qui existaient entre le souverain et celui qui fut, à la chute de la dictature franquiste, la cheville ouvrière de l'avènement de la démocratie dans le pays. Et de fait, les instances politiques étaient massivement représentées, du gouvernement de Mariano Rajoy (accompagné par son épouse Elvira Fernandez) aux communautés autonomes, lors de la cérémonie funèbre conduite par l'archevêque de Madrid, Antonio María Rouco Varela. Felipe Gonzalez, José Luis Rodriguez Zapatero et José Maria Aznar, anciens chefs du gouvernement encore en vie, étaient assis ensemble dans la nef, et même des personnalités étrangères, à l'instar du vice-Premier ministre britannique Nick Clegg, du président du Sénat français, Jean-Pierre Bel, ou encore du président de la Commission européenne, José Manuel Durao Barroso, avaient fait le déplacement.
"Il a servi les Espagnols avec droiture et force dans l'un des moments les plus cruciaux et les plus délicats", a déclaré dans son homélie l'archevêque de Madrid à propos de celui que beaucoup d'Espagnols considèrent comme le meilleur chef du gouvernement de l'histoire du pays. Les proches du défunt, notamment son fils Adolfo Suarez Illana, venu avec son épouse Isabel Flores et leurs enfants Adolfo et Pablo, ont pu l'entendre dresser le portrait d'un homme qui, choisi par le roi Juan Carlos monté sur le trône à la mort de Franco, mit la jeunesse de son époque en mouvement pour dépasser quatre décennies de guerre civile et de dictature et sceller la réconciliation autour du progrès démocratique.
Avant l'hommage de la nation, la famille d'Adolfo Suarez lui avait dit adieu dans l'intimité lors d'obsèques privées à la cathédrale d'Avila, dans sa région natale, où il avait été enterré le 25 mars.