C'était une belle âme, mais une âme torturée. Marie Laforêt, qui nous a quittés le 2 novembre 2019, a souvent été incomprise. La manière dont elle a élevé ses trois enfants – Lisa et Jean-Medhi Azuelos, Debora Delorme Kahn-Sriber – lui a notamment été reprochée. L'une a grandi auprès de sa grand-mère, les deux autres ont été placés en pension. C'est pourtant un traumatisme d'enfance qui a poussé l'artiste à "abandonner" ainsi la chair de sa chair, à la traiter avec distance. Un traumatisme enfoui ! Car il lui aura fallu attendre d'atteindre la soixantaine pour s'en souvenir : elle a été victime d'un viol à l'âge de 3 ans.
"Les souvenirs sont remontés, raconte Lisa Azuelos dans les colonnes du magazine Elle. Comment vivre pendant si longtemps avec ça, caché en soi ? Avec tout ce que ça peut apporter de contradictions et de violence, de non-amour de soi et donc des autres ? En plus, elle n'a rencontré son père qu'à l'âge de 6 ans, car elle est née en 1939 et il a été prisonnier de guerre jusqu'en 1945. Elle a donc grandi sans le regard d'amour inconditionnel d'un homme. Regard qu'elle a cherché toute sa vie, tous ses mariages en témoignent. C'est aussi pour ça que je ne me suis jamais permis de la juger..."
Il est vrai que Marie Laforêt a eu une vie sentimentale plutôt rythmée. Elle a dit "oui" au réalisateur Jean-Gabriel Albicocco en 1961, a de nouveau connu l'amour avec Judas Azuelos (le père de Lisa et Jean-Medhi), a épousé l'homme d'affaires Alain Kahn-Sriber (le père de Debora) en 1971, le chirurgien Pierre Meyer en 1980 et l'agent de change Éric de Lavandeyra en 1990. La plus actrice des chanteuses avait un coeur si grand qu'elle ne savait ni vers où ni comment le diriger... pas même en famille. "La meilleure façon d'aimer des enfants, c'était de les gaver d'amour, elle pensait le contraire, conclut sa fille aînée. Elle croyait que le bonheur était dans l'autonomie."