Il porte sur ses épaules le poids d'un lourd héritage. Celui d'un père (Richard Kolinka, le batteur de Téléphone) et d'une mère (la regrettée Marie Trintignant), celui des grands-parents (Nadine et Jean-Louis Trintignant d'un côté, la survivante d'Auschwitz Ginette Kolinka de l'autre). À 32 ans, Roman Kolinka brille une nouvelle fois devant la caméra de Mia Hansen-Løve avec le film Maya, cette fois-ci dans un rôle principal. Une performance qui pourrait bien lui valoir d'être sous le feu des projecteurs, et peut-être aux César 2019, lui qui est présélectionné pour le prix du meilleur espoir masculin. Mais Roman ne cherche rien de cette célébrité.
Dans un formidable portrait que lui consacre M – Le Magazine du Monde (en kiosques dès le 15 décembre 2018), le jeune homme se dévoile, assume son ambivalence. Il rêve de cinéma sans pour autant mettre toutes les cartes de son côté. "Il en a les moyens, mais il est ambivalent avec ce métier. Il ne cherche pas être acteur et ne fait rien pour l'être", confie ainsi Mia Hansen-Løve qui l'avait déjà dirigé dans L'Avenir face à Isabelle Huppert et dans Eden. "C'est compliqué", justifie de son côté l'intéressé. Parce qu'il a grandi avec le cinéma, de plateau en plateau, il s'est senti obligé de faire l'acteur, le régisseur, l'assistant décorateur. Aujourd'hui, s'il compte quelques films à son actif, Roman ne court pas après les castings ou les metteurs en scène. "Je ne suis pas capable de tout ça, ma pudeur m'en empêche, j'attends sans attendre, sans être tout à fait dans le cinéma", assume-t-il. Comme son grand-père Jean-Louis, il rêverait de jouer pour les cinéphiles. "Moi aussi je ne refuse rien, car on ne me propose rien", déplore quelque part Roman.
"Une chose est certaine, même si je ne décolle jamais, je ne ferai pas n'importe quoi. Je ne peux pas me le permettre, à cause de mon milieu familial", surenchérit celui qui aimerait bien être un nouveau Guillaume Depardieu ou Louis Garrel, ces "fils de" qui ont réussi à être identifiés comme des artistes particuliers. En ligne de mire, une période sombre à Paris il y a plusieurs années de cela. "Je ne me posais même pas la question d'avoir un enfant, tant la situation matérielle ne s'y prêtait pas", se souvient-il.
La situation a bien changé. Depuis, Roman Kolinka est revenu à Uzès, où il vit dans la maison de sa regrettée mère. Son quotidien tourne autour de sa femme Yoko, de ses deux enfants, et d'un restaurant familial baptisé La Famille. Là-bas, il peut évoluer loin des projecteurs, loin des journalistes qui seraient tentés de ne parler que de sa mère, loin de l'actualité qu'il craint de voir ressurgir (à savoir Bertrand Cantat, l'homme qui a tué sa maman).