Dix-sept ans après le meurtre sauvage de Sophie Toscan du Plantier, la justice n'a toujours pas désigné de coupable malgré les énormes soupçons qui pèsent sur Ian Bailey. En mars 2012, la Cour suprême irlandaise refusait l'extradition de cet ancien journaliste de 57 ans pour qu'il puisse être interrogé en France. Un coup dur pour les proches de la productrice et épouse de Daniel Toscan du Plantier, lui-même décédé en 2003. Son entourage garde pourtant espoir et son fils, Pierre-Louis Baudey-Vignaud, prend aujourd'hui la parole dans le Parisien pour réclamer, enfin, le procès du meurtrier présumé : "Un assassin est en liberté..."
Un déni de justice
Âgé de 32 ans, Pierre-Louis Baudey-Vignaud signe la préface d'un livre consacré à sa mère et écrit par ses proches. Le titre est sans ambiguïté : l'Affaire Sophie Toscan du Plantier. Un déni de justice. Pierre-Louis avait 17 ans quand sa mère, âgée de 39 ans, a été retrouvée morte, massacrée à coup de pierres, devant sa maison de Skull en Irlande. La police a très vite trouvé un suspect : Ian Bailey. Cet ancien journaliste de la région signait des papiers qui étaient étonnement bien informés sur la mort de Sophie Toscan du Plantier. En état d'ivresse, Bailey s'est déjà vanté du meurtre, mais en l'absence d'aveux formels et de preuves matérielles, par deux fois, la justice irlandaise renonce à le poursuivre. Depuis 2008, l'instruction est relancée en France avec l'espoir, pour la famille, que la justice permette un procès en l'absence par contumace.
Pierre-Louis Baudey-Vignaud a hérité de la maison de sa mère en Irlande. "C'est une racine importante pour moi, j'aime être là-bas. C'est là que je suis le plus proche d'elle, même si elle est tout le temps en moi", confie le jeune homme au Parisien. Mais à Skull, vit toujours Ian Bailey, le meurtrier présumé. Au printemps dernier, Pierre-Louis le croise dans un supermarché : "Je suis resté complètement figé. Nous sommes rentrés dès le lendemain en France et j'ai mis une semaine à m'en remettre. C'est comme si tout devenait, soudainement, encore plus réel..." Cette triste rencontre pousse le jeune homme à s'investir comme jamais dans l'affaire pour qu'enfin un procès ait lieu. "Un nouveau témoignage est arrivé en décembre. Les agendas de maman n'ont toujours pas été retrouvés. Or, elle notait tout. Si elle avait rendez-vous avec Bailey, on le saura."
Dans le livre consacré à sa mère, Pierre-Louis Baudey-Vignaud raconte en préface le cauchemar qui le hante. Il est seul à la campagne avec sa fillette quand elle monte sur ses genoux, approche son visage tout prêt du sien et lui demande : "Papa, pourquoi tu ne me parles jamais de ta maman ?" Si le fils de Sophie Toscan du Plantier est si déterminé, c'est aussi pour sa fille : "Mes enfants me poseront un jour cette question, je ne veux pas prendre le risque de ne pas y répondre."
Un procès en 2015 ?
D'après nos confères du Parisien, le juge chargé de l'affaire pourrait boucler son instruction d'ici la fin de l'année et devrait s'orienter vers la mise en examen de Ian Bailey. Un procès pourrait alors avoir lieu, malgré l'absence de l'intéressé, en 2015 ou 2016. Si ce dernier est condamné, la France relancerait la procédure d'extradition, sans la garantie que l'Irlande y réponde favorablement. Si Ian Bailey était enfin condamné en France, il pourrait demander à être rejugé en sa présence et faire appel d'une éventuelle condamnation... C'est un très long combat que Pierre-Louis Baudey-Vignaud et ses proches mènent pour la mémoire de Sophie Toscan du Plantier. "Ce n'est pas à moi de dire si Bailey est coupable, mais il doit venir s'expliquer."
"L'affaire Sophie Toscan du Plantier. Un déni de justice" de Julien Cros et Jean-Antoine Bloc, éditions Max Millo, 16 euros, attendu le 30 janvier 2014 en librairie.