"La rue a aspiré mon fils, mais ça ne concerne que la justice." C'est en ces quelques mots que José Anigo, directeur sportif de l'OM, évoquait son fils dans les colonnes du Journal du dimanche en 2011. Deux ans plus tard, la rue a malheureusement eu raison d'Adrien Anigo (30 ans), tué par balles à Marseille hier, jeudi 5 septembre, en pleine rue par deux hommes à moto alors qu'il se trouvait au volant d'une Twingo de location. S'il s'était rangé depuis, il avait néanmoins un lourd passé judiciaire derrière lui...
"Aujourd'hui, ça intéresse qui de dire qu'il a un magasin de sport, une femme et deux enfants ?" José Anigo l'affirmait haut et fort dans le JDD, Adrien avait tourné le dos à ses activités de voyou dans le "Gang des bijoutiers". Une vie de bandit qui l'emmènera derrière les barreaux et entachera aussi la réputation de son père, au casier judiciaire vierge mais aux supposées relations troubles avec le milieu marseillais, souvent sujet aux rumeurs.
Tout commence en 2006, lorsque, après le braquage d'une Poste en septembre, les trois braqueurs présumés, repartis avec 20 000 euros, sont confondus grâce à la plaque d'immatriculation d'une voiture louée par Adrien pour le compte de l'OM, selon La Provence. À partir de là, le fils de José Anigo est soupçonné d'avoir commis, avec trois comparses, plus d'une dizaine d'attaques, souvent violentes et à main armée, dont l'une leur permettra de repartir avec un butin de 1,5 million.
Malheureusement pour eux, leur manque de "professionnalisme" et de discrétion causera leur perte. Si Adrien ne reconnaît son implication que dans un vol à main armée, commis le 8 décembre 2006 à la bijouterie Mac Orlan à Vitrolles (Bouches-du-Rhône), il sont tous interpellés à la suite d'un casse à Pertuis (Vaucluse) en février 2007. Mis en prison, le fils du directeur sportif de l'OM et les trois autres hommes sont libérés en mars 2010 à la suite d'une erreur de procédure. L'un des membres présumés du gang, Alexandre Distanti, sera tué par la police espagnole après un braquage à Alicante en octobre 2011.
Après plus de cinq ans d'instruction, les trois hommes venaient d'être renvoyés le 12 juillet dernier devant les Assises pour cette série de braquages. À Marseille et notamment à l'OM, personne n'ignorait les problèmes d'Adrien Anigo avec la justice, comme l'a rappelé hier sur i-Télé Jean-Claude Dassier, l'ex-président du club. "José m'avait parlé de problèmes lourds, graves, qu'il avait avec ce fils qu'il essayait de faire échapper à la criminalité", a-t-il raconté, ajoutant avoir une "pensée" pour celui au côté duquel il a travaillé pendant deux ans.
La nouvelle de l'assassinat d'Adrien Anigo a provoqué un véritable émoi dans le monde du football français. "Sincères condoléances pour José Anigo. Je suis très choqué", a écrit sur Twitter Pierre Ménès. L'OM a également réagi au drame de son directeur sportif, lui apportant son "soutien". "L'OM et l'ensemble de ses salariés s'associent à leur douleur et sont à leurs côtés alors qu'ils traversent cette terrible épreuve", a indiqué le club dans un communiqué.
Ce drame ne devrait malheureusement pas arranger l'image sulfureuse de José Anigo. Ami d'enfance de Richard Deruda, fiché au grand banditisme et dont le fils a joué à l'OM, le directeur sportif du club a souvent été pointé du doigt pour ses accointances avec le milieu marseillais. Il avait même été placé sur écoute en 2011 dans le cadre d'une enquête sur les liens entre l'OM et le grand banditisme corso-marseillais et une information judiciaire ouverte pour "extorsion en bandes organisées et associations de malfaiteurs". RMC avait notamment eu accès aux procès-verbaux révélant l'"emprise forte" de Richard Deruda sur José Anigo.
Une mauvaise réputation dont il s'est pourtant toujours défendu. "Je ne fais rien de mal et je n'ai rien à cacher. (...) J'ai aussi des liens avec des avocats, des médecins, mais personne n'en parle. On raconte que l'OM serait sous l'emprise du milieu marseillais, mais vous croyez que dans cette ville il n'y a pas de police ? De justice ?", avait assuré José Anigo au JDD. Une interview durant laquelle il avait au passage précisé qu'un autre de ses enfants était d'ailleurs dans la police municipale. Malheureusement, ce milieu a aujourd'hui pris son fils Adrien, malgré ses efforts pour le faire sortir de cette terrible rue.