Après le temps – insoutenable – de l'angoisse puis de la désillusion vient celui du deuil, comme une abominable délivrance : le corps repêché mercredi 6 février 2019 dans la Manche à quelques kilomètres au nord de Guernesey est bien celui d'Emiliano Sala, dont l'avion de tourisme qui le transportait à Cardiff avait disparu dans la soirée du 21 janvier.
Il aura fallu plus de deux semaines de recherches intensives, menées jusqu'à leur terme grâce à un appel à la générosité du public après qu'elles avaient été stoppées par les autorités, pour que le tragique feuilleton connaisse son épilogue et que la famille du jeune footballeur argentin de 28 ans puisse, avec la preuve irréfutable de sa mort, faire son deuil. Des proches qui ont dû encore vivre trente-six heures d'un suspense terriblement éprouvant avant que les autorités publiques anglaises ne forment la certitude qu'il s'agit bien de la dépouille d'Emi et en fassent l'annonce publique, tard dans la soirée du jeudi 7 février. Analysée à Portland dans le Dorset puis transférée à Bournemouth, elle leur sera remise afin qu'ils puissent organiser au plus vite les obsèques en Argentine, un pays aujourd'hui sous le choc.
Le corps de David Ibbotson, pilote du Piper PA-46 Malibu qui s'est abîmé au large des îles anglo-normandes, n'a en revanche toujours pas été retrouvé et les autorités envisagent encore d'essayer de remonter l'épave de l'appareil, localisée par 67 mètres de profondeur le 3 février, après une précédente tentative infructueuse. Le quotidien L'Équipe publiait cette semaine une enquête détaillée retraçant l'étonnante "chaîne d'événements" qui ont conduit ce Britannique de 59 ans, "un peu rouillé avec le système d'atterrissage aux instruments" de son propre aveu, à prendre les commandes de l'avion à la place des deux autres pilotes envisagés au préalable – David Henderson, qui s'est muré dans le silence, et David Hayman, qui avait convoyé Sala et son agent français Meissa Ndiaye à Cardiff le vendredi 18 janvier pour la traditionnelle visite médicale et la signature du contrat de l'attaquant argentin, transféré du FC Nantes contre 17 millions d'euros.
À la suite du communiqué formel des autorités, Romina Sala, la soeur d'Emiliano, a pleuré son frère en lui rendant un émouvant hommage sur Instagram, empruntant des paroles du chanteur argentin Abel Pintos pour accompagner une belle photo : "Ton âme dans mon âme brillera pour toujours, illuminant ainsi le temps de mon existence. Je t'aime Tito", a-t-elle écrit. Elle a par ailleurs indiqué en story que la famille allait récupérer la chienne Nala, le labrador qu'Emi avait placé provisoirement dans un refuge à Nantes avant de s'envoler pour Cardiff.
Depuis la disparition d'Emi, Romina avait multiplié les publications sur le réseau social, l'espoir laissant peu à peu place au fatalisme. "Je t'aime pour toujours", écrivait-elle ainsi en début de semaine en publiant une vue aérienne d'îles de la Manche...
Au-delà du monde du football, durement ébranlé par la mort d'Emiliano Sala, toute l'Argentine s'associe au chagrin et au deuil de sa famille, notamment à Progreso, où il avait grandi. "Il était très aimé et admiré de tous. Ici c'est petit, tout le monde se connaît", a témoigné, à propos de la douleur du village tout entier, un restaurateur ami avec Horacio Sala, le père d'Emi. Le président argentin Mauricio Macri, ancien président du club de Boca Juniors, a adressé ses condoléances à la famille.