On attendait Frédérick Bousquet et seulement éventuellement Manaudou (Laure et/ou son frère Florent), on en aura eu deux sur trois... mais pas Bousquet.
Des championnats de France de natation 2012 à Dunkerque, on retiendra évidemment la renaissance de Laure Manaudou, qui, après une préparation en demi-teinte et loin de la France, a réussi son pari en décrochant son billet pour les Jeux olympiques de Londres (avec émotion, victoires et chronos records en prime) ; on retiendra encore la performance de son frère Florent, élève qui a dépassé le maître et gagné son premier ticket olympique aux dépens de son beau-frère Fred ; on retiendra enfin la sortie émouvante d'Alain Bernard, champion olympique du 100 mètres qui a coulé à pic mais a fait preuve d'une classe hors norme.
Un 50 mètres final fatal aux anciens, un "gros coup sur la tête"...
Pour le nageur antibois, la course de samedi était celle de la dernière chance. Sans réel grand espoir. Las, comme sur la distance où il fut roi (5e en 48"97 du 100 mètres dominé par Yannick Agnel), Alain Bernard a dû se contenter de la cinquième place (22''15) d'un 50 mètres très relevé remporté par Amaury Leveaux (21"93), le revenant, devant Florent Manaudou (21''95), le débutant (nouveau venu sur la distance), et Fabien Gilot (21"96), le constant. Pour Bousquet aussi, il s'agissait de la dernière occase ; mais, le concernant, c'était, malgré son élimination de la spécialité aux championnats du monde de Shanghai en 2011, sa meilleure carte, ce 50 mètres : 4e en 22"05, Fred Bousquet ne disputera pas de quatrièmes olympiades, pas même en relais (qui lui avait permis en 2008 de ramener de l'argent de Pékin). "Un gros coup sur la tête", comme il l'a admis dans son analyse très lucide d'après-course. "C'est dur", a-t-il simplement lâché avant de s'éclipser de Dunkerque, logiquement abattu. Cette immense déception gâche forcément la joie familiale : depuis l'annonce du retour de sa compagne Laure Manaudou à la compétition, un peu au détriment de ses performances sportives à lui, d'un point de vue médiatique, le clan s'imaginait faire corps pour les JO autour de Fred, rêvant d'une qualification pour un, voire deux Manaudou. Non seulement ils n'iront pas en trio complice à Londres, mais c'est en plus celui qui semblait "qualifié d'avance" qui ne sera pas du voyage. Il se consolera en soutenant sa bien-aimée (qui a d'ores et déjà annoncé que l'histoire ne s'arrêterait pas aux Jeux...) avec leur petite Manon, 2 ans dans quelques jours. Florent Manaudou, qui a toujours vu en Fred Bousquet un modèle, a du coup eu bien du mal à se réjouir de son propre succès : "je ne me sens pas le droit de fêter cette qualification", a-t-il déclaré de manière entendue.
Laure Manaudou veut offrir l'un de ses billets pour les JO : c'est non !
Laure Manaudou a fait mieux que réussir son pari : elle voulait un billet, elle en a eu deux, et aurait d'ailleurs cédé le second si les instances l'y avaient autorisée. Impériale dès sa première épreuve aux championnats de France de Dunkerque, remportant son septième titre national sur 100 mètres dos (en 1'00"16) et s'assurant dès lors de partir à Londres cet été pour disputer une distance qui lui a déjà rapporté du bronze olympique et de l'argent mondial, elle s'est offert un doublé en s'adjugeant le 200 m dos samedi 24. Largement victorieuse en 2'08"06, devant une Alexianne Castel (2'08''57) avec qui les relations n'ont jamais été aussi tendues et qui veut prendre sa revanche aux JO et une Cloé Crédeville (2'09''79, un temps largement sous les minima) qu'elle souhaitait emmener dans ses bagages. "Elle apporte une énergie positive dans le groupe", s'était enthousiasmée Laure Manaudou au sujet de Cloé Crédeville, résolue à se déclarer forfait sur le 200 mètres dos des Jeux olympiques dans le but d'entraîner le repêchage de sa copine. Hors de question pour Christian Donzé, le directeur technique national : "Même si Laure Manaudou se retire, on ne prendra pas la 3e. Il faut sortir l'affectif de tout ça. Entre le buzz et la réalité du haut niveau, je choisis la règle du haut niveau. Ce ne sont pas les athlètes qui font la sélection." Dura lex, sed lex.
Standing ovation et émotion pour Alain Bernard
Contrairement à Bousquet, pour qui les fameuses cabines anglaises qui servaient de décor sont inaccessibles, Alain Bernard connaîtra tout de même l'effervescence du bassin des Jeux, puisque, tout comme le prince déchu de la brasse française Hugues Duboscq, il portera les couleurs françaises en relais (sur 4x100 mètres et 4x100 mètres 4 nages). Alain Bernard a eu droit, à Dunkerque, à une standing ovation. De celles qu'on réserve à un gagnant, ou simplement à un grand champion. "L'ovation du public, ça n'a pas de prix. Que je réussisse ou non, le public est toujours derrière moi. Des fois, je m'en veux de ne pas avoir plus de temps à leur consacrer, car je restais concentré sur ma préparation. Je vais prendre un maximum de temps pour les remercier", a déclaré, au bord des larmes, l'Antibois, faisant preuve d'une attitude très saine et très positive dans son interview d'après-course.
Des surprises, de l'émotion, de la tension, des rebondissements et de la tragédie : les France ont fait mieux que tenir leurs promesses.
Liste des qualifiés pour les JO (28 juillet-4 août), source L'Equipe :
HOMMES
Yannick Agnel : 100m, 200m, 4x100m, 4x200m
Hugues Duboscq : 4x100m 4 nages
Fabien Gilot : 100m, 4x100m
Camille Lacourt : 100m dos, 4x100m 4 nages
Clément Lefert : 4x100m, 4x200m, 4x100m 4 nages
Amaury Leveaux : 50m, 200m, 4x100m, 4x200m
Grégory Mallet : 4x200m
Florent Manaudou : 50m
Giacomo Perez Dortona : 4x100m 4 nages
Romain Sassot : 4x100m 4 nages
Benjamin Stasiulis : 100m dos, 200m dos, 4x100m 4 nages
FEMMES
Coralie Balmy : 400m, 800m, 4x200m
Charlotte Bonnet : 4x200m
Alexianne Castel : 100m dos, 200m dos, 4x100m 4 nages
Ophélie-Cyrielle Etienne : 4x200m
Lara Grangeon : 400m 4 nages
Laure Manaudou : 100m dos, 200m dos, 4x100m 4 nages
Camille Muffat : 200m, 400m, 4x200m